> juin 2014

samedi 28 juin 2014

Campagne Always #likeagirl : le féminisme devient bankable et c'est une bonne nouvelle




Depuis quelques mois, j’ai senti un changement de mentalité  s’opérer progressivement : loin d’être un gros mot, le féminisme semble être devenu bankable pour les marques.

On a d’abord pu constater la multiplication de magazines féministes : après Causette, sont venus Bridget, Babette, Louise et autres, preuve que le créneau était porteur.

Puis, on a vu apparaître plus récemment, l’utilisation par les marques des thématiques féministes : il y a eu les portraits de Dove puis l’efficace campagne de Pantène sur les doubles standards de genre.

Aujourd’hui c’est Always qui lance une vidéo très forte et extrêmement pertinente intitulée #likeagirl



Ce film de 3 minutes met en scène des jeunes adultes et des enfants à qui l’on demande de « courir comme une fille » « lancer comme une fille » ou « se battre comme une fille ». Dans le cas des adultes ou des adolescents, ces 3 actions sont immédiatement caricaturées : faire quelque chose « comme une fille » c’est forcément le faire mal, à grand renfort de mimiques et de moulinets de bras ridicules. Pour les petites filles en revanche, courir comme une fille c’est courir le plus vite possible, lancer le plus loin et se battre avec le plus de conviction possible. A quel moment « faire quelque chose comme une fille » est devenu négatif interroge à juste titre la vidéo ?

Le film, extrêmement bien ficelé, pose une question cruciale et marque les esprits bien plus qu’un long discours. Il démontre habilement la force implacable des préjugés et la façon dont ils s’installent progressivement avec le temps. Il met à la fois les larmes aux yeux et la rage au ventre.

J’entends déjà certaines voix ricaner « Ah ah, ils vont bien eues les publicitaires mesdames les féministes hein ». Ne nous voilons pas la face : l’objectif de ce spot est de nous vendre un produit, aucune intention philanthropique là-dessous. Néanmoins, il est la preuve d’un changement notoire de mentalité : n’oublions pas qu’il y a quelques mois encore, Always nous vendait des serviettes hygiéniques parfumées, sous-entendant que nos règles étaient malodorantes ou sales. Si aujourd’hui, la marque utilise la rhétorique féministe, ce n’est certainement pas par humanisme désintéressé mais parce qu’elle a sans doute intégré que le féminisme faisait mieux vendre aujourd’hui que le sexisme. Et c’est en soi une sacrée bonne nouvelle.

Bien sûr, on peut s’interroger sur la cohérence de la démarche, Always appartenant au groupe Procter et Gamble, celui-là même qui nous avait gratifié d'un spot larmoyant sur la mère sacrificielle à l'occasion des jeux olympiques.

Mais si le film peut conduire, ne serait-ce qu’une seule personne, à se poser des questions salutaires, à déconstruire ses préjugés ou à avoir envie de changer les choses alors le but aura été atteint.

Always évite soigneusement de le mentionner mais cette déconsidération des filles et des femmes vient notamment des publicités au sein desquelles elles sont souvent décrites comme fragiles, inconstantes ou futiles. Changer les publicités c’est indirectement changer le monde. Et c’est loin d’être un point de détail.

vendredi 27 juin 2014

Dictionnaire participatif du féminisme : M comme militante par Cécile Vandorme Martin


Aujourd'hui, j'accueille sur le blog Cécile Vandorme Martin, fondatrice de  Féminin-business. Elle nous donne sa vision du mot "militante".

Une personne de mon entourage m’a dit récemment : « pour que ton projet marche, il va te falloir être militante ».
Euh, comment dire, est-ce que j’ai bien compris, là ? Moi, militante ?  Militante, comme politique ? Militante comme Femen ? Militante comme manifestations ?  
Ce furent les premières questions qui me vinrent à l’esprit - preuve que je suis moi-même pleine de stéréotypes, de clichés..) – j’ai eu une réaction d’immédiateté, sans réfléchir, sans chercher à comprendre ni connaitre.  Car militant signifie tout simplement : personne qui soutient activement une cause.  
Moi, ma cause, c’est la conciliation vie personnelle/familiale-vie professionnelle. Sous-tenue par une autre cause, le féminisme.
 Avant je portais cela en moi, sans le dire. En essayant de passer des messages mais sans les revendiquer à haute voix. Et même en le vivant mal, ayant peur, ayant honte parfois de tenir ce discours. Car pour moi, militer c’était manifester, récriminer, râler, pétitionner, se syndiquer, prendre une carte. Sans « concilier ». De manière obtuse. Sans discuter. J’avais en tête des drapeaux, des porte-voix, des claquements de porte qui se ferment.
Et puis, il y a eu une prise de conscience. Après un travail de recherche et d’approfondissement du mot « militant ». Et un travail sur moi, sur mes valeurs, mes attentes de la vie. Et c’est là que j’ai osé, j’ai dit, j’ai écrit, que je suis passée de adhérente à militante.
Pourquoi a-t-il été aussi difficile de me dire militante de ces deux causes, complémentaires : conciliation et féministe ?
Car on associe souvent militantisme et revendications. Et derrière revendications, on entend souvent « c’est mon droit, c’est mon dû », contre tout le reste.
Or je ne me vois pas revendicatrice de droits ou d’un dû, en tant que femme.
J’aspire à ce que, hommes et femmes trouvent chacun une place légitime dans la société, place qui respecte un équilibre auquel on peut prétendre aujourd’hui, au 21ème siècle. Je pense que concilier vie personnelle et vie professionnelle sera aussi bénéfique pour les femmes que pour les hommes.
Je veux cela pour mon mari, mes enfants, les amis de mes enfants et pour tous ceux qui souhaitent vivre sereinement. En accord avec ses envies, besoins, valeurs…
Et je me veux féministe parce que je m’inscris dans une histoire, celle de toutes les autres femmes, qui ont lutté pour que les femmes aient une « juste » place dans la société.  Et si je milite pour cette cause, je ne me rallie en aucun cas à un parti, à une idéologie, à une école de pensée.
Militer pour moi, c’est faire bouger les mentalités ! Ce n’est pas une fin, mais bien un moyen dynamique.
Maintenant, non seulement je défends une cause, mais je la défends activement. Activement par mes paroles, mes discours, mais aussi par mon métier, ma profession. Ma vie quoi !

jeudi 26 juin 2014

Concours d'écriture : Clara de Cyril Oliverio



Lundi dernier, j'ai proposé aux participants du concours d'écriture qui le souhaitaient de venir poster leurs textes ici.

C'est aujourd'hui Cyril Oliverio qui ouvre le bal avec "Clara".


- « Vous savez, parfois, je peux être une vraie garce et d’un snobisme épuisant. Mais, ce que je viens d’accomplir ce soir restera dans.......

Une explosion gigantesque fit voler en éclat le véhicule blindé. Partout, des morceaux de ferrailles, de verre, de chair. Un énorme cratère s’était formé sous la voiture, cicatrisant le bitume sur plusieurs mètres, les vitres des bâtiments autour ont éclaté sur 4 étages sous la déflagration. Des cris de gens paniqués déchiraient la nuit, des flammes éparses consumaient des bouts de plastiques, de tissus, d’autres choses indescriptibles.

Tout était à refaire.

6 mois plus tôt :

Elle se tint droit et sourit modestement en faisant de petites révérences aux clameurs d’une foule qui la plébiscitait. Elle s’écarta légèrement de son pupitre et remercia d’une main émotive un parterre de convives guindés et souriants. Elle marcha à reculons avec une certaine maladresse, sans doute déroutée par l’ivresse de sa gratitude, avant de disparaître derrière un grand rideau noir, laissant la scène orpheline de son aura.
Les applaudissements se tarirent lentement, et bientôt, une rumeur sourde vint envahir le grand théâtre.

Une fois dans les coulisses, pas un soupir de soulagement, elle resta muette, slalomant entre les techniciens qui l’ignoraient et quelques personnes de son staff qui la congratulaient d’applaudissements éparses.
On aurait pu voir son visage se durcir et reprendre les traits de la femme ambitieuse et froide qu’elle était, si elle ne baissait pas la tête en fonçant vers sa loge.
Clara Verdhen, est de ces femmes silencieuses qui n’usent de leur langue que pour aller à l’essentiel. Elle ne s’éparpille pas, ni ne se parjure, droite dans ses escarpins.

-       « J’avais demandé une bouteille d’Orezza très fraîche et un panier de fruit »
-       « Oui, désolé, nous n’avons pas eu le temps  de…»
-       « Pas le temps de quoi ? d’être compétente ? Je n’ai pourtant pas demandé qu’on retapisse ma loge à l’or fin que je sache ? Laissez tomber et dites à mon chauffeur de se préparer »

L’assistante de Clara déguerpit la tête basse en taisant de nombreuses insultes.
Dans la loge, un écran allumé sur une chaîne d’info en continu, rediffusait le discours de Clara. Une journaliste souriante dressait un portrait flatteur et ronflant de la femme exceptionnelle qu’elle était.

Récemment élue « femme la plus puissante du monde » par le magazine Forbes, Clara Verdhen a, une fois de plus, captivé son auditoire par un discours plein de convictions et d’enthousiasme quant à l’énorme charge qui pèse sur ses épaules, de diriger ce conglomérat…

Elle se trouva grosse et détourna le visage de l’écran.

-       « Allo ? Oui, prenez rendez-vous avec mon coach forme pour demain matin. Merci »
 Elle raccrocha et plongea son regard dans ses yeux noirs et profonds, que sa chevelure blonde, n’égaya pas. Elle se scruta dans le miroir jusqu’à voir les abysses de son âme et conclua d’un sourire satisfait que plus rien ne l’arrêterai.


Jour J :

Le Global Water Act met fin à cette guerre que nous nous livrons depuis ces dernières années. Nous savions les réserves d’eau potable amoindries et nous nous les sommes disputés. Bien trop de victimes et de morts que nous aurions pu éviter si nous nous étions entendu intelligemment comme nous sommes désormais en train de le faire. Les deux dernières grandes réserves que sont l’aquifère Guarani et les deux inlandsis géants du Groenland et de l’Antarctique que les Russes ont déjà largement entamé vont être désormais nos trésors, notre espoir. N’oublions pas nos chercheurs, qui redoublent d’effort pour créer le précieux liquide. Que reste-t-il de notre humanité si ce n’est notre responsabilité ? Quel autre être-vivant courrait vers sa mort en connaissance de cause ? Nous l’avons fait ! Esclave d’une société capitaliste et cupide, nous nous sommes enrichis de biens futiles et de confort en nous dépouillant nous-même les ressources vitales et fragiles de notre monde. Vous, les chefs d’état, réunis autour de cette table, vous êtes engagés dans un processus de reconquête de la raison. Il en va de notre avenir, l’avidité ne nous est plus permise…

Clara brillait d’éloquence. Les internautes du monde entier étaient pendus à ses lèvres. Sa voix prenait de l’ampleur, de la profondeur, comme si la fonction lui donnait une dimension de géante.
Elle fut applaudi généreusement, et resta le torse bombé, rigide, en transe. Elle se rappela de ce parlementaire américain qui lui glissa lors de sa nomination à la tête du World Water Act « On avait bien besoin d’une naïade pour nous sauver des eaux héhéhé ! » avec un air de vieux dégueulasse répugnant et machiste. Elle s’accrochait à cet instant comme on s’accroche parfois à des détails insignifiants. Elle méprisait cet homme autant que tous ceux qui ont essayé de lui barrer la route. Mais l’enjeux était trop important pour qu’elle se laisse intimider.

Plus tard, dans la voiture qui la ramenait chez elle, elle regardait les lampadaires dessinant les rues et les avenues en pointillées qui se laissaient découvrir sous les roues de la berline. Elle leva les yeux vers les bâtiments à moitié détruits pour certains et d’autres encore éclairés malgré l’heure tardive, combien de destin derrière ces fenêtres ? Combien de vies encore en danger.

Elle s’adressa à son assistante sans se retourner :
- « Vous savez, parfois, je peux être une vraie garce et d’un snobisme épuisant. Mais, ce que je viens d’accomplir ce soir restera dans.......












mercredi 25 juin 2014

Coupe du Monde : pour eux, les hommes!



Plus de 8 millions de téléspectateurs ont suivi le match Brésil/Croatie, dont une part d’audience de plus de 40% de la part de la « ménagère type de moins de 50 ans » si chère aux publicitaires, selon Médiamétrie.

Gros hic, ces fameux publicitaires n’ont pas su détecter cet engouement féminin  à temps et sont restés scotchés aux stéréotypes les plus datés (j’en avais épinglé quelques uns dans ce billet).

Dernier cliché en date, l’affiche de Pix’Hall, relevée par le site « Les Nouvelles News » : pour Monsieur qui  fait partie de «ceux qui aiment le foot », on propose un écran plat, pour Madame, planquée derrière son livre, qui fait partie de « ceux qui sans foot » on propose…une machine à laver !

 La marque Axe, quant à elle, offre aux hommes la possibilité de collectionner les images de femmes de joueurs en petites tenues, façon Panini !



Le site Rue du Commerce s’adresse lui aussi exclusivement aux hommes pour leur vendre une tablette tactile à l’occasion de la Coupe du Monde : « Regardez-moi, je suis un drapeau blanc, un cessez-le-feu,  un traité de paix avec votre femme. Parce que maintenant les soirs de match vous lui laisserez la télé. ». La marque enfonce le clou avec une signature qui fleure bon la testostérone « Rue du commerce, 1200 marques qui font rêver les hommes ».



« La marque renforce son ancrage auprès des hommes en live en tweetant pendant les matchs de l’Equipe de France » nous explique le site CB News car c’est bien connu, le foot c’est pas un truc pour LAFAAAME.

Sur la page Facebook, ça se confirme, le community manager ne semble parler qu’aux hommes (alors que paradoxalement, ce sont les femmes les grandes gagnantes des concours sur le site):

Alors que les femmes représentent 85% des décisions d’achat aux Etats-Unis, il paraît anachronique en 2014 pour un site internet marchand de s’aliéner ainsi une partie se sa cible.

D’autant que les femmes sont de plus en plus nombreuses à surfer sur tablettes tactiles nous apprend cette étude Médiamétrie : 2,1 millions de plus en un an. Au total, au 4ème trimestre 2013, 5,2 millions de femmes se sont connectées à Internet depuis une tablette en moyenne chaque mois.

Par ailleurs, une étude menée par She-conomy a démontré qu’en 1998, seules 69% des femmes entre 18 et 24 ans étaient impliquées dans l’achat d’appareils électroniques pour la maison. En 2008, ce chiffre est passé à 91% en partie grâce à l’importance des téléphones portables et des ordinateurs.

Malgré ces chiffres éloquents, les publicitaires semblent être restés à l’époque « Mad Men ». Pas vraiment étonnant quand on sait que 97% des créatifs en agence de publicité sont des hommes !



Dictionnaire participatif du féminisme : "X comme chromosome X" par Anna Ploime



Aujourd'hui c'est Anne Ploime, journaliste et auteure du blog "L'abaissée du chômage" qui inaugure notre dictionnaire participatif du féminisme avec "X comme chromosome X"! Bienvenue à elle!

X comme ce chromosome qui nous confère ce précieux 6ème sens, les fabuleuses joies de la maternité, une parfaite maitrise des tâches ménagères … ce même chromosome nous est pourtant défavorable sur le marché du travail. Vérité de La Palice me direz-vous ! Certes, je ne vous apprends rien. Mais alors pourquoi nous marteler ces mêmes slogans tous les ans à l’occasion de la journée des droits des femme :

« Egalité salariale », « Au travail, hommes – femmes même combat ! » Et toujours si peu d’avancées. Même une Ségolène Royal au second tour n’y a rien changé !


Aigrie Anna ?… Non réaliste une fois de plus et peut-être pessimiste, c’est vrai … Mais il y a de quoi !


Lors d’un entretien, un directeur de la rédaction d’une chaine d’information, celle qui donne la priorité au direct (même s’il ne se passe rien) accepte de me recevoir grâce à l’aide d’un ami d’un collègue de mon mari (Cf R comme réseau, primaire et secondaire). 

Ravie, je compte bien tout faire pour réussir ce rdv et ne veux rien laisser au hasard.

Je retouche donc mon cv, je m’entraine à me présenter en 1mn comme le conseillent tous les coach. Je répète devant ma glace, j’imagine plusieurs scénarii et tente de deviner les questions auxquelles je devrai certainement répondre le jour J : 

- comment concilier hard-news et analyse de l’information ?

- comment vérifier les sources d’information à l’heure des réseaux sociaux ?  

- comment promettre une extrême réactivité tout en garantissant un sens aigu de la synthèse et de l’analyse d’information ?


Mais je n’y suis pas du tout ! Naïve que je suis !!


La première question (et la dernière) fut finalement beaucoup plus pragmatique :

« Comment comptez-vous faire garder vos jeunes enfants ?» Tiens cette question à un air de déjà entendu… Souvenez-vous quand Laurent Fabius ironisait sur la candidature de Ségolène Royal à l’élection présidentielle avec cette question « mais qui gardera les enfants » Ah Ah Ah Ah Ah qu’est-ce qu’on se marre !!!!!!


« Mes enfants ? Répondis-je. Ils sont inscrits à la crèche de 8h à 19h ». A ma connaissance aucun journaliste n’assure intégralement cette tranche horaire. 

Peut-être voulait-il me proposer la tranche 0h-4h. Zut c’est dommage, là je ne peux pas. La crèche est en effet fermée la nuit, c’est vraiment bête !!


L’entretien fut bref et s’est soldé par une ineptie qui caractérise tellement ces vrais-faux entretiens (cf E comme entretien) « En ce moment nous ne recrutons pas de nouveaux journalistes présentateurs. » 

Pas un mot sur mes expériences passées, ni sur mes (éventuelles) compétences. Même pas l’ébauche d’une réflexion sur l’info continu, ses écueils, voire ses dérives….

Non. Ce directeur n’aura finalement retenu qu’une chose de mon CV : mon statut parental. J’ai 2 enfants. Mon mari aussi. 
Mais à lui, la question de la garde des enfants ne lui a jamais été posée.


Aurais-je dû procréer une fois ma carrière bien lancée et prendre ainsi quelques risques avec mon horloge biologique ? Bien sur que non !


En conférence de rédaction, ce même directeur a dû certainement commander auprès de son équipe de journalistes plusieurs reportages à l’occasion de la Journée de la Femme; il a dû proposer l’organisation de débats avec des experts et sociologues sur le sujet … Et s’est même probablement targué d’avoir un taux élevé de femmes (jeunes et jolies pour la plupart) parmi ses collaborateurs, sans doute d’ailleurs.


Mais quand même cette question sur la garde de mes enfants … 

Etre une femme … 

Etre une feeeemme comme chantait Michel Sardou déjà très lucide dans les années 80 quand il claironnait « Question salaire, ca ne va pas mieux … celui d’un homme coupé en deux … On les enfume de parité mais qui promet l’égalité » !
 







mardi 24 juin 2014

Interview de Juliette Lancel, créatrice du Tumblr "Harcèlement de rue"



Les initiatives au sujet du harcèlement de rue ne manquent pas (avec parfois un certain problème de transparence, j'en avais parlé dans un précédent billet).

Une d'entre elles a aujourd'hui particulièrement retenu mon attention, le projet photographique de Juliette Lancel, qui vient de lancer le Tumblr "Harcèlement de rue".

Elle a accepté de répondre à mes questions.


Bonjour Juliette, peux-tu te présenter ?

Je suis doctorante à l'EHESS, en pleine rédaction d'une thèse sur l'histoire du rêve aux XVIIe et XVIIIe siècles. A côté, je pratique la photographie depuis une dizaine d'année maintenant, en développant des thématiques liées au portrait, au corps et aux mythes. Le fait que la photographie ne soit pas mon métier me permet de rester libre d'en faire absolument ce que je veux... dont ce projet.

Quel a été ton parcours avant de créer le tumblr « Harcèlement de rue » ?

Depuis le lycée, je me suis impliquée - parfois de près, parfois de loin – dans les luttes pour l'égalité. L'une d'entre elles est le féminisme, en particulier depuis quelques années, ma réflexion ayant été abondamment nourrie par les études de genre et l'intersectionnalité.

Comment est né ce projet ?

Dans un bar ! Plus précisément, autour d'une table où échangeaient des militant-e-s et sympathisant-e-s du collectif Même pas Mâle. Plusieurs hommes témoignaient de leur ignorance totale du sujet avant qu'une femme leur en parle. Comme souvent, cela fait partie du privilège de ne pas être conscient de l'oppression subie par les non-privilégié-e-s.

Que souhaites-tu véhiculer à travers ce projet ?

J'aimerais que ce projet soit aussi bien à destination des hommes que des femmes.
Des femmes, parce qu'il est essentiel de dire et répéter que leur ressenti est légitime, qu'elles ne sont pas seules, que ce n'est pas contre elles qu'elles doivent être en colère et surtout que ce n'est pas une fatalité.

Des hommes, parce qu'avant que le sujet ne soit abordé, cela m'est déjà arrivé, plusieurs fois, quand je me risquait à en parler à un ami, de me voir répondre que c'était un compliment, que si je ne le prenais pas comme tel c'était que je ne m'assumais pas, que la tenue vestimentaire était un appel, que je surréagissais, qu'ils auraient bien aimé que cela leur arrive, et caetera.
Ces remarques, habituelles, sont très révélatrices d'une incompréhension du poids constitué par le harcèlement de rue et de la souffrance qu'il entraine au quotidien.
Si ce tumblr peut aider à faire en sorte que des hommes deviennent une part de la solution et non une part du problème, il aura accompli sa tâche.

En quoi se différencie-t-il des autres projets lancés récemment ? (Le projet crocodile par exemple).

C'est un projet centré sur le témoignage dans ce qu'il a d'intime, une plongée dans le partage d'un moment vécu, dans laquelle le regard est un support au texte, et le texte un support au regard. Il m'a semblé important que les participantes viennent avec leurs habits de tous les jours, sans préparation particulière, et surtout qu'elles utilisent leurs propres mots, à la différence du projet crocodile qui est plutôt une reconstruction et qui par ailleurs ne traite pas spécifiquement du harcèlement de rue.

Pourquoi avoir crée une version française et anglaise ?

L'image est un medium universel, je trouvais dommage que le texte en limite la portée. Les pays dans lesquels le harcèlement de rue n'est pas toléré socialement sont une exception, pas la norme. L'anglais est une bouteille à la mer.

Pourquoi parle-t-on davantage de cette thématique ces derniers temps ?
En quoi les réseaux sociaux ont-ils changé la perception du harcèlement de rue d’après toi?

J'ai l'impression qu'il y a eu plusieurs étapes, à commencer par le documentaire de Sofie Peeters, qui a entrainé une libération de la parole, y compris chez des femmes qui ne sont pas des militantes. Plusieurs nouveaux projets d'action et d'information ont vu le jour ces derniers mois et ont fait boule de neige.
Les réseaux sociaux ont aussi joué un grand rôle à la fois par leur capacité de diffusion et surtout par leur capacité à combattre l'isolement. Prendre conscience du fait qu'on n'est pas la seule à le vivre, qu'on peut témoigner, échanger, qu'il existe des analyses politiques  et qu'il est possible de se battre est extrêmement jouissif et libérateur.

Comment peut-on t’aider concrètement pour faire avancer ce projet ? Souhaites-tu récolter de nouveaux témoignages ? Comment souhaiterais-tu le faire évoluer dans le futur ?

La phase de récolte de témoignage et de prises de vue s'est faite en amont - j'avais lancé un appel il y a quelques mois. On pourrait continuer presque à l'infini, puisque ce ne sont hélas pas les témoignages qui manquent, mais la quantité n'est pas forcément ce qui prime dans ce projet.
En revanche, vous pouvez aider en relayant, surtout en direction d'autres pays où ce genre de démarche existe peut-être moins. Aider ces images à continuer leur chemin par elles-mêmes, pour arriver jusqu'à des gens n'en auraient pas entendu parler autrement, et peut-être semer quelques graines.


Pour en savoir plus:

Concours trousses "Les Griottes" : les résultats!




Comme convenu, voici le résultat du tirage au sort des 3 gagnants.

Ont gagné une trousse « Les Griottes » :

-       Fille d’album
-       Gaëlle
-       Nanouak

Merci de m’envoyer un mail à sophiegourion(at)hotmail.fr en me précisant vos coordonnées ainsi que la trousse choisie (maîtresse ou enfant), la couleur, le texte et le style d’écriture .

Entre temps, j’ai depuis reçu le magnifique cartable personnalisé Tann’s pour ma fille, merci aux Griottes pour ce superbe cadeau !

J’ai bien essayé d’influencer ma fille dans son choix : « Non mais le rose t’es sûre ? Le rouge c’est sympa non ? » « Le lapin, vraiment ? Tu ne veux pas un autre motif ? », je me suis heurtée à chaque fois à un cinglant « C’est MON cartable, je fais ce que je veux ! ». Je crois que si l’option « impression paillettes + licornes » était disponible, elle l’aurait choisie, juste pour embêter sa féministe de mère ! (ceux qui m’accusent régulièrement de vouloir interdire le rose peuvent être rassurés, je n’y arrive même pas avec ma fille !).

Le cartable est de très bonne qualité, avec matelassage dans le dos et suffisamment grand pour y caser des cahiers A4 (ainsi qu’une ramette car, oui, l’école comme l’année dernière demande une ramette entière). L’impression est vraiment magnifique et encore plus jolie que celle présentée en photo sur le site.


Ma fille passant en CP l’année prochaine, le choix du premier cartable est un moment particulier et chargé d’émotions. Je suis ravie que le sien corresponde à ses goûts.

Quant à mon fils, fini le Tann’s traîné depuis le 3 ans, une autre page se tourne. Après l’interdiction de lui donner des petits surnoms devant les copains, il souhaite désormais avoir un Eastpak plutôt qu’un cartable.

Que le temps passe vite !

Pour en savoir plus :
Site internet « LesGriottes »
Page Facebook « LesGriottes »


lundi 23 juin 2014

Résultats du concours d'écriture "Une femme exceptionnelle".



Vendredi dernier, j'ai rejoint les 2 fondatrices de Librinova dans leurs locaux pour discuter ensemble du choix des 3 gagnants.

Nous avons reçu au total 25 participations, toutes de très grande qualité, et choisir n'a pas été une mince affaire.

La preuve, nous avons finalement décidé de décerner 4 prix et non 3 comme prévu initialement, tant il nous a été difficile de trancher!

Je ne vous fais pas patienter davantage, voici donc le nom des gagnantes:

1er prix : gagne une formule publication d'une valeur de 75€ + le service premium pendant 3 mois  (valeur : 45€) :  Carène Ponte avec "3 femmes"

2ème prix : gagne une formule publication d'une valeur de 75€ : Dominique Bochel Guégan avec "Briques sauce cailloux"

3ème prix : gagne une formule publication d'une valeur de 75€ : Nicole Prieur avec "La maison au toit de chaume"

Coup de coeur du jury : gagne une formule publication d'une valeur de 75€  : Serval Frayer avec "Bien ordinaires"

Bravo à toutes les 4!

Sachez que j'ai eu beaucoup de plaisir à vous lire, le petit plaisir quotidien de vos textes dans ma boîte mail va me manquer!

Pour information, je n'avais pas connaissance de l'identité des auteur(e)s et n'ai découvert ces informations qu'après la délibération. Si 4 femmes ont gagné, ce n'est que pure coïncidence!

Pour ceux qui le souhaitent et qui ne font pas partie des gagnants, je propose de publier leur texte sur le blog, afin d'en faire profiter le plus grand nombre. Contactez-moi si cela vous intéresse.

vendredi 20 juin 2014

Elles osent! Entreprendre au féminin : Coline Debayle d'Artips



Bonjour Coline, peux-tu nous parler d’Artips? Quel est son concept, comment est née cette newsletter ?

Bonjour Sophie,

Artips est une start-up française, qui apporte une dose d’art au quotidien. Trois fois par semaine, recevez gratuitement une anecdote originale et captivante sur une œuvre d’art connue ou moins connue. A lire par email, en moins d’une minute. Artips rend l’histoire de l’Art plus accessible à la fois en termes de mobilité et de contenu. Artips peut-être lu dans le métro sur smartphone, en famille sur tablette ou bien au travail sur ordinateur.

Pourquoi Michel-Ange est-il revenu pour signer sa Pietà comme un voleur ? Pourquoi la serveuse du bar des Folies-Bergères représentée par Manet semble si mélancolique ?
Quelles sont les prémonitions pas si surréalistes de Dali ou de Brauner ?

De l’Antiquité à l’art contemporain, Artips permet d’appréhender des œuvres d’art sous un angle nouveau. Avec plus de 80 rédacteurs spécialistes dont certains professeurs d’histoire de l’Art, Artips raconte chaque jour une anecdote mémorable sur une peinture, une sculpture ou une photo…

Le projet est né d’une frustration que je partageais avec mon associé. Diplômée
de Sciences-Po et d’HEC, j’étais très attristée de constater que, dans la vie active, on manque de temps pour se cultiver ou pour visiter des expositions. Mon associé quant à lui se levait tous les matins à 5 heures afin de lire de l’histoire de l’art avant d’aller développer des solutions techniques innovantes.

Quel a été ton parcours ?

J’ai été récemment diplômée de HEC et Sciences-Po Paris. J’ai également vécu un an aux Etats-Unis. J’ai lancé Artips avec Jean, 6 mois avant d’être diplômée.

Quel est le modèle économique d’Artips ?

-       Nous proposons à des musées de parler de leurs propres œuvres
-       Nous proposons à des grands groupes d’envoyer nos anecdotes à leurs employés
-       Nous avons édité un livre avec les meilleures anecdotes. Nous développons actuellement une application mobile. L’objectif est de fournir des options à nos abonnés comme par exemple un programme sur mesure, un focus sur une période, une visite guidée, les « 10 secrets d’une exposition ».


Peux-tu nous dresser le portrait robot d’un ou d’une abonné(e)? Combien d’abonné(e)s comptez-vous à ce jour ?

Il n’y a pas de portrait robot d’un ou d’une abonnée Artips. Le point commun de tous nos lecteurs est leur « curiosité ». Nous sommes très lus par les enseignants, les étudiants, entre autres, partout en France et déjà dans plus de 115 pays.
Aujourd’hui, nous comptons plusieurs dizaines de milliers de lecteurs.  

Comment trouvez-vous les anecdotes racontées par le site ? Quelle est ta préférée ?

Nous avons créé un réseau de plus de 80 spécialistes (professeurs, guides, médiateurs, étudiants…) qui proposent leurs anecdotes au gré de leurs visites et de leurs coups de cœur. Chaque anecdote est ensuite validée par Gérard Marié, professeur d’histoire de l’art dans des facultés parisienne pour s’assurer que tout notre contenu soit parfaitement crédible


Comment expliques-tu le succès des newsletters comme Artips ou My Little Paris ou d’applications comme « Un texte, un jour » ?

Que ce soit les newsletters de My Little Paris ou d’Artips, chaque email est très travaillé. Une équipe de spécialistes est mobilisée pour assurer une constance dans la qualité du contenu. Et puis, c’est un petit rayon de soleil dans notre quotidien, souvent très stressant.

En tant que femme, quelles ont été les difficultés rencontrées lors de la ta création d’entreprise ? Comment as-tu pu lever ces freins ? As-tu bien été accueillie dans le milieu du numérique ?

Etre une femme a des avantages et des inconvénients dans le milieu entrepreneurial, dans le monde du digital et dans l’univers professionnel en règle général.
Pour ma part, ça a vraiment été un atout et je n’ai jamais rencontré des interlocuteurs qui ne m’accordaient pas la même crédibilité qu’à un homme. En revanche, il faut bien choisir les personnes qui vont nous entourer au quotidien dans l’aventure (associé, employés, partenaires...) , ils sont la garantie essentielle de l’égalité.

Quels conseils donnerais-tu à une femme qui souhaiterait se lancer aujourd’hui ?

Lancez-vous, mais ne vous lancez pas seule. Associez-vous avec quelqu’un en qui vous avez une confiance professionnelle à toute épreuve, car des épreuves il y en aura !
N’attendez pas de tout savoir si l’entrepreneuriat, c’est impossible. Vous apprendrez.

Fais-tu partie d’un réseau féminin ? Si oui lequel ?

Non, je ne fais pas partie d’un réseau féminin, mais j’en côtoie certains.

As-tu un exemple de femme qui a pu t’inspirer ou avoir valeur d’exemple ?

Oui, j’ai lu le livre de Shéryl Sandberg,  actuellement COO  de Facebook. Elle analyse le comportement et la perception des femmes à fortes responsabilités dans le monde professionnel. Sous pression, hommes et femmes ne réagissent pas de la même façon de par les conventions établies.  Je vous invite à le lire, il est très instructif !


Quelles sont les futures évolutions d’Artips ?

Il y en a beaucoup à venir ! Les prochaines en date sont le lancement d’une application mobile et la traduction d’Artips en anglais et en espagnol en septembre prochain.

Pour en savoir plus : le site internet d'Artips