> Quand un médecin nie la souffrance des femmes : "Le point du mari c'est dans la tête"

vendredi 18 avril 2014

Quand un médecin nie la souffrance des femmes : "Le point du mari c'est dans la tête"



Décidément, le point du mari n’en finit pas de faire parler de lui.

Aujourd’hui c’est au tour de Jean Marty, président du Syndicat national des gynécologues-obstétriciens de France (Syngof) de s’exprimer dans le Monde.

Pour lui, « le point du mari, c'est surtout dans la tête des femmes que cela se passe ».

Allons bon, cette mutilation ne serait qu’une vue de l’esprit, une simple manifestation psychosomatique.  En effet, « selon ses recherches, le plus souvent, les douleurs ne viennent pas d'un problème anatomique – la flexibilité du vagin s'adapte au fur et à mesure de la reprise des relations sexuelles – mais sont liées à l'acceptation psychologique de sa vie sexuelle. »

Pourtant, le médecin affirme sans aucune logique une ligne plus loin : « Vous avez des femmes qui ont été victimes, incontestablement. La chirurgie est du domaine de l'art, on peut penser que certains médecins ont eu l'idée qu'en modifiant un peu leur façon de suturer, ils amélioreraient un peu la sexualité, et ça, ça ne nous choque pas ».

Donc Jean Marty affirme que tout se passe dans la tête des femmes mais en même temps, confirme l’existence de cette pratique. Etrange argumentation.

Il compare également sans ciller une mutilation intime à de l’art. Pour lui, recoudre un périnée façon Picasso ça n’est pas choquant. C’est juste artistique.

Pour Jean Marty, le véritable problème après tout ce n’est pas le point du mari mais les femmes, ces incorrigibles bavardes, qui s’excitent d’un rien : « On est dans l'absurde, le fantasme, c'est un sujet qui réveille l'excitation », et dont il ne faudrait pas trop parler – conseil d'accoucheur expérimenté – pour ne pas provoquer un peu plus la somatisation vaginale, ou l'expression physique d'un problème psychique, selon lui très fréquente chez les femmes. « Vous avez aussi des femmes qui sont bien dans la victimologie, qui se retrouvent dans une forme de souffrance parce qu'elles arrivent à susciter l'intérêt », estime-t-il. »

Quel mépris des femmes, quelle violente négation de leur douleur en ces quelques mots.

Et que dire de la « victimologie » ? Les femmes ne souffriraient (ou ne simuleraient la souffrance) que dans le but d’attirer l’attention ? Je plains les victimes qui ont dû être examinées par ce médecin après un viol. « Non, vous ne souffrez pas, tout est dans votre tête. De toutes façons, vous ne cherchez qu’à attirer l’attention. Un conseil de médecin : surtout n’en parlez pas, vous risqueriez une somatisation vaginale. »

Je proposerais bien à ce Monsieur une petite épisiotomie d’une dizaine de points pour qu’il vérifie par lui-même si la douleur n’est que la manifestation de l’égarement d’un esprit trop fragile. On verra de quelle manière il « acceptera psychologiquement sa vie sexuelle » avec sa balafre tout juste cicatrisée.

Tiens la sexualité des femmes, parlons-en. « Une sexualité épanouie, ce « n'est pas un cadeau que la nature donne à tout le monde », conclut-il, citant une vieille chanson de Georges Brassens, La Femme s'emmerde en baisant. ». Donc Mesdames, estimez-vous heureuse d’avoir eu une vie sexuelle avant votre grossesse et ne venez pas pleurnicher désormais. Après tout, une sexualité épanouie n’est pas donnée à tout le monde.

Puisque ce cher Jean Marty semble apprécier Brassens, à mon tour de conclure en chanson :

« Le temps ne fait rien à l´affaire
Quand on est con, on est con
Qu´on ait vingt ans, qu´on soit grand-père
Quand on est con, on est con ».

A bon entendeur…





9 commentaires:

  1. J'étais contente de voir que vous aviez pris le temps d'écrire sur les propos insultants et sexistes de ce médecin, mais je suis un peu déçue à la lecture de votre article. Vous utilisez majoritairement l'extrapolation et les comparaisons discutables pour le contrer, ce qui peut à la rigueur se faire en cas d'absence d'arguments, mais reste toujours le discours le plus faible.
    Il y a pourtant tellement moyen de le discréditer en restant purement factuelle : la moindre citation des dires de ce médecin est déjà truffée de préjugés haineux et infondés sur les femmes. Mais cela reste encore à expliquer...
    Bravo et merci tout de même pour votre contribution. Laisser de tels propos circuler sans réagir est encore ce qu'il y a de pire ;-)

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    1. Vous êtes déçue par l'article? Libre à vous d'en écrire un plus intelligent, je serais ravie de le lire!

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  2. Bonjour,
    je suis contente de voir que vous avez écrit cet article. En effet hier soir lorsque j'ai lu les propos de ce médecin (!) rapporté par le Monde, j'ai été extrêmement choquée. J'ai cependant pensé que parfois la presse déforme des propos, j'ai donc écrit au syndicat pour leur demander des clarifications... La réponse de Monsieur J.Marty est édifiante: il me conseille de "relire sans passion"...C'est tellement caricatural que je ne sais même plus si je dois en pleurer ou en rire...
    Merci donc pour votre article qui me confirme que ces propos, ou du moins la manière dont ils sont rapportés,sont plus que choquants...

    S.L.

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  3. Merci de votre éclairage! Incroyable le manque de remise en question de ce monsieur...il persiste et signe donc! Etonnant qu'il ne vous ait pas accusée d'avoir un problème psychique!

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    1. Oui, comme vous dites, c'est assez incroyable. Voir des médecins, gynécologues de surcroît, qui parlent de cette manière, et qui ne se rendent même pas compte du problème que ça pose, ça m'attriste et ça m'effraie à la fois... Il n'y à qu'à voir le témoignage de Pralyonne en dessous...

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  4. A la lecture de cette interview, j'ai d'abord cru à une "blague", style article du Gorafi, mais non...
    Je suis tellement scandalisée que j'arrive à peine à y croire.
    Au-delà du point du mari, c'est toute une omerta dans ce domaine qu'il faut dénoncer, comme vous le faites.
    « Selon ses recherches, le plus souvent, les douleurs ne viennent pas d'un problème anatomique – la flexibilité du vagin s'adapte au fur et à mesure de la reprise des relations sexuelles – mais sont liées à l'acceptation psychologique de sa vie sexuelle » : de tels propos, et donc de telles façons de pratiquer, sont tellement graves et désastreuses pour les femmes... Ma première gynéco me disait pareil, que la douleur pendant et hors des examens c'était dans ma tête ; il a fallu que j'en "teste" 3 autres pour qu'enfin le dernier, un jeune gynéco par ailleurs extrêmement respectueux lors des consultations (jamais d'examens entièrement nue quitte à "perdre du temps" entre la remise du haut, l'enlevage du bas etc., paravent pour se déshabiller et rhabiller et séparer la table d'examen de la porte d'entrée, "tissu" médical pour nous couvrir lors des examens, explications de tout ce qu'il s'apprête à faire et pourquoi, excuses lorsqu'il voit que l'on a un peu mal etc. Bref, tout ce qui devrait être normal et est pourtant si rare !) me dise droit dans les yeux "ce n'est pas une vue de votre esprit, si vous me dites que vous avez mal on va trouver d'où cela vient, et même si cela est une douleur consécutive à un blocage psychique, il n'en reste pas moins que cette douleur est réelle et on trouvera une solution". Autant dire que ça fait doublement du bien à entendre, de savoir que l'on va enfin vous aider et que l'on arrête de vous culpabiliser ! Résultat, c'est lui qui m'a opérée pour un problème bien réel, et m'a par ailleurs dirigée vers une kiné spécialisée pour travailler sur le blocage musculaire qui s'était développé parallèlement en réaction psychique à la peur de la douleur.

    Désolée pour ce long témoignage un peu brouillon, mais quand j'en discute autour de moi je me rends compte que je suis loin d'être la seule et que la vision de ce monsieur gynécologue (!) est malheureusement tellement répandue...

    Merci encore pour votre contribution (sur ce sujet et bien d'autres !) je me retrouve totalement dans votre conception du féminisme !

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  5. Merci pour cet article (et tous les autres d'ailleurs), j'étais également choquée par l'article dans le Monde, surtout quand on sait que l'épisiotomie est inutile, je vous renvoie à l'article du blog de Marieaccouchelà - (explorations politiques et féministes autour de la naissance)

    http://marieaccouchela.blog.lemonde.fr/2014/01/10/episiotomie-excision-ce-sexe-feminin-qui-effraye/#more-173

    Je suis en colère, j'ai l'impression d'avoir souffert plusieurs années à cause de gynécologues qui ont justement nié ma souffrance alors que mes rapports étaient devenus douloureux : "vous ne devez pas assez désirer votre partenaire" - "c'est un simple problème de position" - "c'est dans la tête" - "c'est votre os du pubis pas bien placé - y'a rien à faire" (?!) ... Ils sont passés à côté d'un phénomène très simple, un médicament ayant pour effet secondaire une baisse de libido et de lubrification d'où des rapports douloureux. Malheureusement les mois passant, j'ai développé une dyspareunie (20% des femmes en souffrent)... Heureusement je suis aujourd'hui prise en charge par une gynéco et une kiné qui ont reconnu que j'avais un vrai problème et que ce n'était pas "dans la tête". Après plusieurs années d'abstinence, je peux enfin reprendre une vie sexuelle normale et non douloureuse !

    Pour celles qui souffrent de dyspareunies comme moi (douleur persistante pendant les rapports) ou de vaginisme, il existe une association, Les clés de Vénus, pour vous aider sur tous les niveaux, car psychologiquement c'est dur d'être privée d'une sexualité épanouie. Ca n'a pas l'air d'être la priorité de beaucoup de gynécos ! Tant qu'on est bonnes à faire des enfants, tout va bien, peu importe les douleurs lors des rapports !

    Merci Sophie pour tous ces articles, continuez !

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  6. Plus de sources scientifiques sur l'inutilité de l'épisiotomie et la similarité du "point du mari" avec l'infibulation :

    http://sorcieredulogis.blogspot.fr/2013/04/lepisiotomie-pour-ceux-qui-veulent.html

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  7. MERCI!!!!
    Je ne réagis quasi jamais aux articles que je peux lire sur le net, mais là je ne peux pas ne pas réagir!
    Je suis profondément choquée par les propos de cet homme! J'ai beaucoup de mal à me l'imaginer médecin et encore moins gynécologue! Ce sont des personnages comme lui qui discréditent toute la profession et nous confirment qu'une grande partie des médecins ne le sont que pour l'argent.
    De plus sa réponse à S.L. est encore plus humiliante pour les femmes que nous sommes.
    J'ai deux enfants (ma joie, mon bonheur!!!), j'ai accouché des 2 par voie basse. Je "fais des petits bébés" 2kg7 pour le premier et 2kg6 pour la petite deuxième mais j'ai quand même eu une épisio à chaque fois! Certes petites 2 et 3 points mais une épisio quand même. J'ai eu de la chance car je n'ai eu aucune séquelle, mais je lisais déjà à l'époque (en 2005) des témoignages de femmes sur différents forums qui parlaient de douleurs, de souffrance et (tiens tiens tiens) de point du mari!
    Surement fantasmaient-elles!!??? (Je suis furieuse qu'en 2014 on puisse encore traiter la douleur des femmes avec autant de mépris)....
    Si vous ne l'avez pas lu, je vous recommande la lettre ouvert de Barbara Strandman sur le site de médiapart
    http://blogs.mediapart.fr/blog/barbara-strandman/190414/lettre-ouverte-au-dr-jean-marty-president-du-syndicat-national-des-gynecologues-obstetriciens
    Merci encore pour votre blog! Je me sens moins seule !

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