> Hommes et féminisme : ne me libérez pas, je m'en charge!

jeudi 5 septembre 2013

Hommes et féminisme : ne me libérez pas, je m'en charge!



Dans un de mes précédents billets, j’avouais être choquée que les patrons de 2 magazines proclamés féministes, Bridget et Causette, soient des hommes.

Tout comme j’avais été pour le moins dubitative d’apprendre qu’un homme était derrière le mouvement Femen.

J’ai bien senti que cette affirmation provoquait quelques interrogations et qu’il flottait dans l’air un discret soupçon de misandrie à mon encontre.

Comme cette question a fait l’objet d’un débat très intéressant sur Twitter entre @Catnatt @fsoulabaille (qui en a d’ailleurs fait un billet), @lactualaloupe et moi-même, j’ai décidé d’en faire un post, moyen beaucoup plus pratique pour s’expliquer que 140 caractères.



 Oui, je suis définitivement opposée à ce qu’un homme dirige un mouvement ou un journal féministe. Tout comme je suis favorable à la non-mixité au sein des mouvements féministes. Cela ne fait pas pour autant de moi une misandre engluée dans sa détestation générale des hommes.

1ère raison : S’il l’on part du principe que nous vivons dans une société patriarcale, avec une domination masculine, on évite de la reproduire au sein même des organisations ou publications censées les dénoncer.

Car même avec la meilleure volonté du monde, il est extrêmement difficile de s’extraire de ses conditionnements genrés, avec, en corollaire, le risque d’une confiscation du pouvoir. Cet excellent article du blog « Le mauvais genre » sur le sujet rappelle qu’ « une littérature sociologique abondante (par exemple Le sexe du militantisme) a montré comment les stéréotypes de genre tendaient à se reproduire dans les mouvements sociaux, un phénomène qui n’épargne pas le mouvement féministe – rappelons ici que MLF avait un mal fou à obtenir que les hommes restent en queue de cortège lors des manifestations pour le droit à l’avortement, et que les groupes MLAC, groupes mixtes de défense de l’avortement, étaient dirigés et contrôlés par les médecins – … des hommes. ». L’exemple extrême reste celui des Femen, au sujet duquel on a appris récemment qu’il était dirigé par un homme, Viktor Sviatski. Dans un documentaire, celui-ci déclarait ainsi « «Ces filles sont faibles. Elles n'ont pas un caractère fort. Elles n'ont même pas le désir d'être fortes. Elles se montrent soumises, molles, pas ponctuelles, et plein d'autres facteurs qui les empêchent de devenir des activistes politiques. Ce sont des qualités qu'il est essentiel de leur apprendre.» «J'espère que grâce à mon comportement patriarcal, elles refuseront le système que je représente.». Bien sûr, tous les hommes pro-féministes ne sont pas d’horribles machos. Néanmoins, il est impossible pour tous, hommes et femmes, de s’extraire, même temporairement, de ses propres conditionnements genrés.

2ème raison : Au-delà du risque de la confiscation du pouvoir, il existe un risque de confiscation masculine de la parole.

Cet excellent article très documenté d’Antisexisme l’explique très bien : les personnes dominantes sont celles qui parlent le plus, d’après une étude de 2002. « Cette relation entre temps de parole et pouvoir était présente qu’elle que soit le type de domination : domination liée à la personnalité ou domination liée à un statut social. Cette corrélation était également  plus forte chez les hommes que les chez femmes, ce qui tend à confirmer que chez les hommes, établir un statut de pouvoir est une fonction importante de la parole. Les femmes parlent également pour établir un statut social, mais cela est moins marqué, et la parole a surtout pour fonction d’établir des liens.
Ainsi, la différence en temps de parole entre hommes et femmes et le fait que globalement les hommes ont tendance à prendre la parole aux femmes en les interrompant, pourraient être liés à une différence de statut entre les deux sexes dans la société. »
Je me souviens d’un atelier sur les stéréotypes ayant eu lieu lors du forum sur la mixité auquel j’ai assisté cette année. Dans la salle, une quarantaine de femmes pour 5 hommes environ (à priori favorable aux questions d’égalité). Malgré cela, les hommes ont occupé la plus grande part du temps de parole. Et quand les femmes ont énoncé leur ressenti, ces derniers ont cru nécessaire de le rationnaliser ou de l’expliciter.

3ème raison : Je crois en l’auto-émancipation des femmes. « Ne me libérez pas, je m’en charge », slogan du MLF, reste furieusement d’actualité. Aurait-on eu idée de mettre un blanc à la tête d’un mouvement luttant contre l’esclavagisme? On va me répondre que l'abolition de l'esclavage a été définitive suite aux actions de Victor Schoelcher ou m’évoquer Lincoln. Soit. Dans le féminisme de la première vague, Léon Richer est lui-même souvent décrit comme le « père du féminisme français ». A l’époque, le combat féministe consistant à obtenir les mêmes droits civiques, notamment le droit de vote, l’appui des hommes, stratégique, était donc nécessaire. Mais très vite, la question de la mixité, pour le féminisme comme pour le mouvement américain pour les droits civils, s’est posée, comme l’explique Christine Delphy :

« La pratique de la non-mixité est tout simplement la conséquence de la théorie de l’auto-émancipation. L’auto-émancipation, c’est la lutte par les opprimés pour les opprimés. Cette idée simple, il semble que chaque génération politique doive la redécouvrir. Dans les années 1960, elle a d’abord été redécouverte par le mouvement américain pour les droits civils qui, après deux ans de lutte mixte, a décidé de créer des groupes noirs, fermés aux Blancs. C’était, cela demeure, la condition

- pour que leur expérience de discrimination et d’humiliation puisse se dire, sans crainte de faire de la peine aux bons Blancs ;
- pour que la rancœur puisse s’exprimer – et elle doit s’exprimer ;
- pour que l’admiration que les opprimés, même révoltés, ne peuvent s’empêcher d’avoir pour les dominants – les noirs pour les Blancs, les femmes pour les hommes – ne joue pas pour donner plus de poids aux représentants du groupe dominant.

Car dans les groupes mixtes, Noirs-Blancs ou femmes-hommes, et en général dans les groupes dominés-dominants, c’est la vision dominante du préjudice subi par le groupe dominé qui tend à… dominer. Les opprimés doivent non seulement diriger la lutte contre leur oppression, mais auparavant définir cette oppression elles et eux-mêmes. C’est pourquoi la non-mixité voulue, la non-mixité politique, doit demeurer la pratique de base de toute lutte ; et c’est seulement ainsi que les moments mixtes de la lutte – car il y en a et il faut qu’il y en ait – ne seront pas susceptibles de déraper vers une reconduction douce de la domination. »


4ème raison : « Compatir n’est pas pâtir » pour reprendre l’expression de Christine Delphy. Les hommes peuvent ressentir de la compassion envers les discriminations vécues par les femmes, se sentir révoltés mais ils n’expérimenteront jamais réellement ces situations « La non-mixité est nécessaire parce que les hommes n’ont pas le même intérêt, ni objectif ni subjectif, à lutter pour la libération des femmes. Mais surtout parce que les opprimé-e- s doivent définir leur oppression et donc leur libération elles / eux-mêmes, sous peine de voir d’autres les définir.
Et il est impossible de le faire en présence de personnes qui d’une part appartiennent au groupe objectivement oppresseur ; et d’autre part ne savent pas, et ne peuvent pas savoir, par définition et sauf circonstances exceptionnelles, ce que c’est que d’être traitée comme une femme – comme un-e Noire, comme un pédé, comme un-e Arabe, comme une lesbienne, comme un-e ouvrièr-e – tous les jours de leur vie. Aucun degré d’empathie ne peut remplacer l’expérience. Compatir n’est pas pâtir. »

Cette affirmation se vérifie tous les jours sur les blogs ou les forums féministes. Lorsqu’une femme témoigne d’un viol notamment, fleurissent les commentaires masculins expliquant que eux ne sont pas de violeurs ou tentant de relativiser ou expliquer l’acte (« elle était ivre » « elle était en mini-jupe » « le violeur était un fou isolé »). Ou encore expliquant aux femmes comment militer ou ce qui est sexiste ou ne l’est pas. Je vous renvoie à ce sujet à l’article très détaillé de « Genre !» sur le mansplaining.

Voilà en 4 raisons pourquoi je suis définitivement opposée à ce qu’un homme dirige un mouvement ou un journal féministe. Tout comme je suis favorable à la non-mixité au sein des mouvements féministes.

Pas parce que les femmes sont de pauvres êtres faibles qu’il faut extraire des griffes des hommes.

Pas parce que je déteste les hommes.

Les hommes peuvent être nos alliés dans notre lutte pour l'égalité mais ne les laissons pas parler à notre place.

Ne nous libérez pas, nous nous en chargeons.


29 commentaires:

  1. A mon sens il y a un gap entre rejeter le fait qu'un "homme dirige un journal ou mouvement féministe" (ce que je peux tout à fait comprendre) et la non-mixité de ces derniers.

    En effet, comment faire évoluer les mentalités des hommes si ce n'est en les mettant justement au contact de féministes ? En les incluant ? Car la finalité, c'est l'égalité dans la mixité non ? Et si elle devait être temporaire, alors quand décider que la non-mixité des mouvement n'aurait plus lieu d'être ?

    Je pense que beaucoup d'hommes qui ne sont pas totalement réfractaires à la lutte féministe ont besoin d'être éduqués et accompagnés. Comme vous le soulignez il y a souvent des réactions de justification de la part des hommes quand sont abordés des sujets féministes, ce qui dévie parfois sur du mansplaning ou pire...

    Mais je crois que c'est car beaucoup ont du mal à gérer l'idée qu'ils soient avantagés sans l'avoir jamais souhaité. Cette espèce de responsabilité commune dont chaque homme a profité "malgré lui".

    Je ne dis pas que les hommes sont à plaindre loin de là, mais je suis convaincu que le féminisme a tout à gagner à les intégrer de façon intelligente, à des degrés divers dans son combat.

    C'est peut être con, mais je crois que beaucoup d'hommes ne seront jamais aussi sensibles aux arguments féministes que quand ces derniers leurs sont apportés et expliqués par d'autres hommes. Et pour cela, pour faire tâche d'huile, il faut bien commencer par en accepter quelques-uns dans vos rangs.

    Je suis curieux de savoir ce que vous penserez de mon avis.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci d'écrire exactement mon ressenti, en tant qu'homme.

      D'ailleurs, j'oserais me qualifier de féministe si je ne craignais qu'en vertu de ma qualification d'homme blanc cisgenre hétéro on m'explique que je ne puisse pas l'être par nature. Disons donc alors "féminist friendly" si c'est plus acceptable.

      Que la direction des mouvements féministes restent entre les mains des femmes, c'est impératif.

      Mais exclure, par exemple d'une manif, les hommes sympathisants, à la seule raison qu'ils ne sont pas femmes, c'est faire le jeu même du système qui te catalogue en fonction de ce que tu es, et non de ce que tu fais.

      Supprimer
    2. Vous comprenez mal l'auteur de l'article.

      Déjà, en tant que féministe radicale, il est absurde pour elle de dire que quelqu'un ne puisse pas être de tel ou tel bord politique "par nature". Quand elle parle d'aveuglement des hommes et de leur manque d'expérience du ressenti des femmes, ce n'est pas "par nature", c'est par construction sociale. Vous avez été conditionné comme un "homme", elles elles ont été conditionnées comme des "femmes", ça fait que vous n'avez pas et ne pouvez pas (et ce n'est pas votre faute) avoir la même compréhension de ce qu'elles vivent. Vous avez des angles morts parfois insurmontables, mais de par votre place, pas de par votre sexe (c'est la société qui fait coïncider les deux).

      Ensuite, elle ne dit pas qu'il ne doit pas y avoir des hommes féministes, ni qu'ils ne doivent jamais participer à rien. Elle dit qu'il ne faut pas qu'ils abusent en cherchant une position de pouvoir dans le féminisme. En gros "je suis un homme contre le fait que les hommes accaparent tous les pouvoirs... mais j'accapare le pouvoir dans le mouvement même qui lutte contre cet accaparement." C'est une position hypocrite et intenable pour un véritable homme féministe.

      Quant à la non-mixité, je ne crois pas qu'elle ait dit nulle part qu'il fallait que le féminisme entier soit non-mixte. Elle parle de moments clefs de non-mixité, où les femmes peuvent s'exprimer, se concerter et prendre des décisions sans que des hommes soient systématiquement là pour commenter, juger et superviser. C'est une soupape de sécurité nécessaire pour s'assurer que les décisions prises ne le sont pas sous l'influence d'hommes, et donc potentiellement reconductrices de schémas patriarcaux.
      Que dans un deuxième temps des hommes s'informent, se documentent, discutent avec des femmes et des hommes féministes, assistent à des conférences sur le féminisme, posent des questions, proposent des idées... c'est bien, et même très nécessaire. Tant que ça ne compromet pas le noyau non-mixte indispensable au mouvement et à la réflexion préalable.

      J'espère que je vous ai correctement paraphrasée, Sophie, et que LPF comprendra mieux !

      Supprimer
    3. Merci Tix, votre réponse est très éclairante et pédagogique! Désolée, j'ai écrit ce texte qui mériterait des réponses aux commentaires plus approfondies mais j'ai eu très peu de temps aujourd'hui! Merci donc d'avoir pris le relai! :-)

      Supprimer
    4. Au contraire, je le trouve d'une clarté limpide, votre article !
      Je ne reformule avec d'autres mots que parce qu'apparemment certains n'ont toujours pas compris, et comme c'est fatigant de toujours répéter la même chose qu'on a déjà très bien expliquée et qu'au bout d'un moment on a du mal à trouver toute seule 36 manières différentes de la reformuler, c'est bien que d'autres prennent un peu le relais...
      C'est aussi à ça que ça sert, d'être fédérés autour d'une notion comme le féminisme. ;)

      J'espère que deux cerveaux qui disent la même chose différemment sauront cette fois se faire comprendre sans interprétation erronée !

      Supprimer
    5. Un ENORME merci alors! je vais vous embaucher comme community manager du blog surtout que je trouve vos explications plus claires que les miennes :-)
      Bon plus sérieusement si vous avez un blog, je serais ravie de vous lire!

      Supprimer
    6. Merci, vous me rendez toute chose. #^-^#
      Je n'ai actuellement pas de blog, je me contente de poster des félicitations/ajouts/critiques sur ceux des autres pour le moment, mais je songe de plus en plus à en créer un, seule ou en partenariat. Besoin de m'exprimer et de partager, je crois !
      Si jamais je saute le pas, je vous préviendrais volontiers. ;)

      Supprimer
    7. Ca serait une très bonne idée! Prévenez-moi quand vous vous serez lancée!

      Supprimer
    8. Merci Tix de la reformulation.

      Ca peut sembler du coupage de tif en douze, mais selon moi c'est important.

      J'avoue avoir volontairement forcé le trait dans mon premier commentaire, pour justement faire surgir ces précisions nécessaires (à mon avis).

      Allez va, je vais encore une dernière fois prendre la mouche sur la phrase "Je ne reformule avec d'autres mots que parce qu'apparemment certains n'ont toujours pas compris, et comme c'est fatigant de toujours répéter la même chose qu'on a déjà très bien expliquée".

      Je découvre le blog de Sophie Gourion, je lis ce billet, je prends comme une pique très désagréable certaines remarques, donc je commente. Désolé de ne pas avoir passé 10 heures à lire l'ensemble des billets de ce blog et des écrits conseillés avant de réagir.

      Et c'est en répétant encore et encore et encore, quitte à en être fatigué jusqu'à la moelle, qu'on arrive à faire passer des idées.

      Je le vis (sur d'autres sujets) au quotidien.

      En tout cas, bravo à vous deux (entre autres) pour les mots que vous posez. Merci.

      Supprimer
  2. Merci pour votre commentaire.

    Absolument d'accord avec l'histoire des privilèges dont les hommes ont profité sans en avoir conscience.

    Pour la mixité, je pense en effet que des espaces de discussion sont possibles entre hommes et femme au sein de mouvements féministes, mais de façon temporaire. Notamment parce que les hommes peuvent être eux aussi victimes du patriarcat, ce que je n'ai pas mentionné dans l'article.
    En revanche, les instances décisionnaires doivent rester, à mon sens, féminines. Ce qui n'empêche pas d'intégrer ponctuellement aux débats et réflexions des hommes pro-féministes.

    RépondreSupprimer
  3. Bonjour. (Pour me situer : Je suis un homme.)

    "Voilà en 4 raisons pourquoi je suis définitivement opposée à ce qu’un homme dirige un mouvement ou un journal féministe."
    Pour moi, ça, c'est une évidence.

    "Tout comme je suis favorable à la non-mixité au sein des mouvements féministes."
    Mais ça, j'aimerais juste qu'on développe un peu. Le principe des temps et lieux non-mixtes, je le comprends très bien, et ça me semble aussi nécessaire (et c'est d'autant plus nécessaire que la pression des hommes pour nier l'intérêt de ces temps non-mixtes est relativement lourde, il me semble). Mais la mixité dans d'autres circonstances me semble aussi utile, voire nécessaire également.

    Je veux dire, le féminisme englobe deux problématiques : L'oppression des femmes et la déconstruction des genres. Et l'oppression des femmes va se faire de moins en moins visible à mesure que les inégalités vont se réduire. Donc pour compléter la dernière étape, accéder réellement à l'égalité, il faudra alors s'appuyer de plus en plus sur la déconstruction des genres plutôt que sur l'étude des processus sociaux d'oppression.

    Dans le cas contraire, le féminisme se verra de plus en plus souvent accusé de vouloir inverser les rapports de force initiaux.

    Et si le but ultime est bien la déconstruction des genres, alors ça passe aussi par la mixité. D'autant plus que pour que les oppresseurs abandonnent leur domination, il va bien falloir, je crois, qu'ils y mettent de la bonne volonté, donc qu'ils se sentent de plus en plus intégrés à ce projet, et de moins en moins condamnés à endosser leur genre masculin. On ne peut pas à la fois défendre la déconstruction des genres, et "appuyer" la norme des genres (tel que c'est ressenti par les exclus).

    Enfin je ne sais pas si je suis bien clair. Personnellement, j'ai l'impression que les temps non-mixtes sont nécessaires pour toutes les raisons qui ont été dites, mais aussi pour travailler à une intégration sécurisée des hommes dans les temps mixtes (et j'insiste sur le "sécurisée").

    (Enfin c'est comme ça que je le vois, en tout cas. J'espère ne pas faire de détournement en faveur de ma position d'homme.)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Comme on dit puis, je plussoie intégralement cette réponse.

      Supprimer
  4. Merci pour ce billet. En tant qu' « homme pro-féministe », je suis méfiant vis-à-vis de toute position totalement pro-mixité ou à l'inverse complètement contre dans toutes circonstances. A ce que je comprends, vous êtes proche de la 2ème position mais avec quelques nuances (c’est clair dans votre commentaire ci-dessus). Je suis d’accord sur plusieurs points assez centraux mais je voudrais exprimer quelques réserves.

    D’abord, le coup du « vous êtes contre parce que vous n'aimez pas les hommes » est pathétique bien sûr, en plus ça s’entend souvent : j'espère néanmoins que les arguments qui vont dans un sens plus favorable à la mixité (pas inconditionnelle hein) ne sont pas tous aussi stupides, en tout cas j’aimerais bien les connaître (avec leurs limites). Je dis ça juste pour signifier qu’on pourrait raisonner de manière symétrique et préjuger qu’il pourrait exister de bonnes raisons. Sûrement trop long pour un billet, je reconnais.

    Vous dites qu'il est « impossible pour tous, hommes et femmes, de s’extraire, même temporairement, de ses propres conditionnements genrés » : cela implique que des femmes puissent reproduire des comportements ou des opinions sexistes, si je ne me trompe pas. Je sais que ça pèse beaucoup moins que le sexisme des hommes, mais ce n'est pas négligeable pour autant, non ? C'est pour moi le même « travail sur soi » qu'on a à faire dans les deux cas, même s'il est plus intense quand on est un homme.

    Quant au risque de confiscation du pouvoir (c’est l’argument central je crois, d’ailleurs il revient dans vos trois premières "raisons") ou de la parole, c'est clair que ça s'est vu à maintes reprises mais avec une organisation solide (exclure les hommes de ce qui est décisionnel comme vous dites, limiter le temps de parole etc.), ne peut-on pas faire diminuer ça sérieusement ? En gros, l’idée serait de réguler les risques de domination en interne plutôt qu’en jugeant le comportement des hommes "a priori" (ce qui est pour moi la limite principale des arguments anti-mixité).

    « Ne me libérez pas, je m’en charge » : ça me semble être en grande partie le même argument que le point précédent, les femmes doivent rester les principales actrices – c’est sûr. Mais en disant ça, on évacue le débat sur la place des hommes, si l'on veut bien admettre qu'il en faudrait une (même « toute petite »). De plus, vous dites dans le commentaire ci-dessus que des hommes peuvent être eux-aussi des « victimes », alors est-ce que ça ne veut pas dire que eux aussi ont à se libérer (pas dans la même mesure, pas nécessairement dans le même cadre etc.) ?

    La 4ème raison évoquée est un peu fragile par rapport aux autres à mon avis. Certaines femmes – dans des positions plus privilégiées – sont beaucoup touchées que d’autres, devrait-on à ce motif les mettre au second plan ? Les femmes sont loin d'avoir les mêmes expériences, même s'il y a un minimum de vécu commun. Doit-on exclure les hommes à ce motif qu'ils ne souffrent pas assez directement pour s'engager ? On peut aller vraiment loin avec ce raisonnement, c’est risqué. Je trouve ça plus intéressant de se dire que ce qui est en jeu c’est des rapports de pouvoir, l’essentiel étant de différencier celles et ceux qui les reconnaissent ou pas, celles et ceux qui luttent réellement pour les abolir ou pas etc.

    Enfin, quand aux connards du style à relativiser les viols (ou qui vous accuse d'être misogyne ou je ne sais quoi encore), je me demande si c'est à partir de leurs cas qu'on est obligé de réfléchir. Je suis peut-être trop optimiste mais j'espère que c'est pas eux qui on majoritairement envie de se rapprocher des féministes...


    RépondreSupprimer
  5. Merci pour vos commentaires, très argumentés et construits (alors que je m'attendais à davantage d'agressivité et j'en suis ravie!).
    Je le répète ici puisque visiblement ce n'est pas très clair dans mon texte : je suis pour que la plupart des moments soient non mixtes, surtout lorsqu'il s'agit de moments d'échanges entre femmes sur des questions douloureuses comme le viol, l'avortement par ex, qui nécessitent neutralité et non-jugement. Mais cela n'exclut pas des moments mixtes, pour discuter et déconstruire les stéréotypes, aborder la question des privilèges etc...Idem, l'idée n'est pas d'exclure les hommes car "ils ne souffrent pas assez" mais plutôt de les considérer comme d es alliés. Ils peuvent bien sûr ressentir de la compassion, avoir envie de changer les choses mais ils ne doivent pas se substituer au ressenti et au témoignage des femmes car ils n'auront jamais leur vécu "en tant que femmes". Par ailleurs, je précise également que les hommes sont aussi des victimes collatérales du patriarcat et que les femmes peuvent également avoir parfaitement intériorisé le sexisme, quitte à être parfois aussi macho que certains hommes! J'en parle ici notamment au sujet de la misogynie au travail http://www.toutalego.com/2012/05/la-misogynie-feminine-au-travail-entre.html . Dans cet autre article, je pointe les stéréotypes de genre repris dans des articles...écrits par des femmes http://www.toutalego.com/2013/07/femme-un-inevitable-destin-de-plante.html

    RépondreSupprimer
  6. ah !
    mince !
    encore un groupe d'opinion auquel je vais pas pouvoir m'inscrire !
    bon ben c'est pas grave hein : j'ai quand même le RSA pour vivoter, le toit de ma mère, et j'ai même le droit de refaire des études et d'écouter les cours de prof de socio féministe à la fac
    donc
    ça va.

    bon, nan parce que bon, en tant que non-ouvrier, j'avais déjà du mal à partager les ressentis dans le cadre du parti communiste... alors que j'étais un des rares à avoir lu le capital...
    mais bon
    c'est pas pareil

    ça prend aux tripes

    tiens j'ai signé pour l'associaction zéro macho
    et puis je me suis aperçu que les mecs qui font ça sont vaguement au parti socialiste : le parti des traitres sociaux par excellence.

    donc je suis deviendu très méfiant
    c'est marrant, les humains, pour moi, quelque soit leur genre, c'est pas fiable.

    ma misanthropie me détruira de l'intérieur parce qu'il faut bien que je me regarde dans la glace de temps en temps.

    bon, j'ai du ménage, du racommodage et une lessive à faire.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Paul, je vous rassure, je ne dirige aucun mouvement féministe (et je n'appartiens à aucun d'autre eux non plus, entre autre à cause de la récup politique) :-).Vous pouvez donc adhérer à tous les mouvements féministes qu'il vous chante puisqu'ils sont généralement mixtes (ex Osez le féminisme, Mix-cité, Ni pute ni soumises...). Et en attendant, continuez à me lire et à venir commenter!

      Supprimer
    2. ah
      ouf
      je suis rassuré

      nan mais c'était uniquement un peu sarcastique à mon propre sujet en fait.

      j'ai signé chez zéromacho : pis je me suis aperçu que c'est bourré de socialistes... des traitres sociaux... donc je suis vachement emmerdé !

      au fait, pour qu'un commentaire passe, il faut le limiter à combien de caractères ?
      nan, parce que j'avais pondu une réponse un peu plus sérieuse et ça passe pas et je me suis aperçu qu'en réduisant la taille ça passe...

      finbon...

      Supprimer
    3. je connais ce débat depuis fort longtemps et il est effectivement problématique.
      je pense à la citation que vous faite de la camarade Christine Delphy quant à la compassion. ce problème a souvent été soulevé aussi dans les milieux anarchistes et communistes. personnellement je suis communiste. Or de part ma naissance, je suis petit-bourgeois, donc sans identité de classe et prolétaire qui s'ignore, ou fantasmant sur le pouvoir de la classe du pouvoir bourgeois. La question est effectivement de savoir dans quelle mesure la prise de conscience que l'on a faite, et dans la mesure il y a le parcours de construction de cette prise de conscience est en adéquation avec la problématique centrale du mouvement d'émancipation d'un groupe dont l'identité se construit sur le vécu d'une domination/soumission autant que sur une pratique commune intime de la relation à l'autre et à soi de part des modes de vie socio-culturo-économique commun. même si on a lu Marx et Rosa Luxemburg, quand on est né petit-bourgeois, est-ce qu'on peut identitairement vivre et partager la construction d'une nouvelle "économie" relationnelle avec des ouvriers qui eux ont une toute autre construction identitaire ?
      ça se sent effectivement dans les rapports entre militants : y'a les ouvriers peut instruits, peut rôdé à la conceptualisation d'une économie globale et anthropologique et les petit-bourgeois qui sortent de l'université après moulte intégrations conceptuelles et surtout un rapport à l'économie radicalement étranger à celui de l'ouvrier ainsi qu'une totale incapacité à s'identifier au groupe ouvrier car le propre de la petite-bourgeois est l'individualisme, voire l'égoïsme narcissique. Même en ayant fait son autocritique psychanalytique, on reste construit à partir de ça. et dans les discussions avec le camarade militant ouvrier, ça se ressent. ils ne rédigent pas avec les mêmes référentiels sémantiques et c'est fondamental.
      l'objectif de réunir toutes les classes sociales autour de la prise de conscience de la prolétarisation due, entre autre, à l'incontournable division hiérarchisée du travail dans la société que les communistes cherchent à mettre en oeuvre afin de dépasser la lutte des classes et de construire la société sans classe, nous on conduit, dans les partis communistes, à accepter quiconque sans discrimination de classe et donc de pratiquer la mixité.
      la question qu'on se pose, depuis longtemps, au regard de l'histoire de l'évolution des partis dans le cadre de la dictature de la bourgeoisie comme dans le cadre des régimes ayant tenté de réaliser le communisme, est celle de l'efficacité de cette ouverture qui semble avoir systématiquement été la porte à la récupération par les habitus bourgeois et petit-bourgeois des mouvements marxistes et anarchistes et en fait à la destruction progressive du travail de construction idéologique comme sociale d'une autre société.

      bref, je conçois parfaitement votre démarche. et je n'ai pas de réponse précise et positionnée à faire.
      d'autant, qu'à l'écoute des réponses que j'obtiens de la part de la grande majorité de copines que je connais dans la vie quotidienne, quand je glisse une orientation féministe dans l'argumentation, j'obtiens systématiquement les poncifs de critiques non féministes à l'égard du féminisme, voire parfois, les poncifs antiféministes machistes... sans compter qu'on ne comprend évidemment pas que ce soit un célibataire congénital qui amène ça sur le tapis.
      il y a réellement, dans les référentiels sémantiques sociaux, une incompatibilité entre le fait d'être un homme et le fait de tenir un discours féministe.
      j'ai même eu de la part d'une profe de psycho-socio la réponse "oui mais ça c'est parce qu'on vous soupçonne d'être homosexuel"... ce qui m'a évidemment fait sourire. finbon...

      Supprimer
    4. Oui moi aussi j'étais un peu sarcastique hein...
      Pour les socialistes, j'ai bien compris que vous ne les portiez pas dans votre coeur, vous les aviez déjà traités de traitres sociaux dans votre précédent commentaire.
      Je n'étais pas au courant qu'il existait une limitation de caractères, c'est bizarre cette histoire pourtant certains m'écrivent des tartines et ça passe.
      Peut-être que Blogger estime que vous avez atteint votre quota de commentaire sur le blog :-)

      Supprimer
    5. nan j'suis vachement emmerdé en fait. je comprends pas moi-même pourquoi je tends régulièrement à avoir besoin de m'inscrire dans un groupe. j'ai en fait pas besoin du parti communiste pour être convaincu du communisme. quand j'y vais, au parti, je m'emmerde. je mets ça sur le compte de la récupération électoraliste qui a pourri le parti dans le cadre de la dictature bourgeoise (ils appellent ça la démocratie). mais ce que j'observe aussi, ce sont ces incompatibilités de prise de conscience entre membres de classes, genres, ethnies, différentes. et force m'est de constater que je n'y trouve pas ma place. donc je m'en vais sur la pointe des pieds.
      pour le féminisme, ben c'est pareil.
      pour l'anarchie, c'est pas pareil : là je suis pas du tout anarchiste.

      Supprimer
  7. Autant je suis d'accord sur le fond, autant je suis perplexe à propos de Causette... Je me rappelle qu'au lancement du magazine, j'avais lu une interview du patron. Il expliquait qu'il avait créé un journal pour sa femme, un journal qu'elle aurait aimé lire, elle qui ne se reconnaissait pas dans les magazines féminins. Il racontait qu'il avait eu des difficultés à monter son projet car personne ne croyait qu'un tel magazine pourrait se vendre. La voie était libre à ce moment là, il n'y avait pas de concurrence. Puis Causette a eu suffisamment de succès pour que la concurrence commence à se développer (à mon avis, Bridget est le premier mais il y aura d'autres (pâles) copies). Personne n'empêchait une femme de lancer un magazine de ce genre... C'est un homme qui en eu l'idée, c'est son idée, c'est donc normal que ce soit lui qui la réalise.
    Par ailleurs, il y a bien plus que du féminisme dans Causette, il y a la quasi absence de publicités, des sujets de politique et de société, il y a un magazine indépendant, ce qui est très appréciable à l'heure actuelle et malgré tout, un magazine qui contribue à changer certaines choses, d'autant que pour ce que j'ai pu en juger autour de moi, il peut plaire autant à une adolescente qu'à une personne âgée, et les hommes le lisent également.
    Je n'ai pas l'impression qu'on puisse mettre sur le même plan l'homme patriarcal qui crée un groupe féministe radical antipatriarcal et un homme qui a l'idée de créer un journal indépendant dans lequel les femmes tels qu'il les conçoit pourront se reconnaître.
    Grazia et Biba sont dirigés par des femmes, et pourtant les articles sont souvent néfastes pour le féminisme !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je précise bien dans l'article que je ne mets pas sur le même plan l'affreux macho derrière Femen et le patron de Causette (je dis que c'est un exemple extrême). Causette a le mérite d'avoir rendu le féminisme accessible et attractif pour une cible qui n'était pas forcément acquise à sa cause et c'est déjà énorme. J'ai plein de copines qui se disent non-féministes et qui le lisent régulièrement. Je veux bien croire que son patron ait eu des difficultés à se lancer car le sujet était peu "bankable" à l'époque. Maintenant, le milieu des investisseurs et de la presse étant extrêmement masculin, le fait qu'il soit un homme a dû nécessairement jouer en sa faveur, notamment en terme de crédibilité. Dire "personne n'empêchait une femme de le faire" revient à dire "personne n'empêche une femme d'être PDG" ou "personne n'empêche une femme de gagner autant qu'un homme", c'est mettre de côté tous les freins sociologiques existants. Encore une fois, je ne critique pas le magazine en lui-même que je lis régulièrement mais m'interroge sur le fait qu'un homme soit à sa tête.

      Supprimer
    2. "...m'interroge sur le fait qu'un homme soit à sa tête"
      il me vient une idée là à la suite de votre remarque : peut-être que ce sont surtout des hommes dans notre société qui ont des idées saugrenues de monter un magazine pour des cibles à l'égard desquelles ils n'ont pas grand chose en commun mais de faire croire qu'ils y adhèrent pour crédibiliser aux yeux de tout un tas de "partenaires d'affaires" leur projet qui en fait revient à faire du fric, du fric et de la gloire.
      je dis pas que des femmes ne puissent pas avoir des idées aussi malsaines que celles des hommes !
      MAIS, justement du fait de la straturation des orientations sociologiques qui deviennent soit des freins soit des accélérateurs, ce sera surtout des hommes qui réussiront dans ce genre d'entreprise.
      pour la quasi totalité des produits capitalistes, je me pose la question de leur utilité d'une part et de leur vertu d'autre part. est-ce que ce sont des produits sains ?
      je n'ai pas lu les magazines dont vous parlez ici et je ne les lirai probablement jamais, surtout en les achetant. il fût une époque où j'y jetais un oeil rapide dans les étalages de maison de la presse des gares de la régions parisienne. là faudrait que je passe et traîne dans les rayon presse des Leclerc de ma campagne pour les lire... euh... non... je fais toujours mes courses en un temps record, ne supportant pas la vulgarité de l'étalage de produits nocifs à tous les rayons, les ignobles programmes radios ambiants, et les gros titres imbéciles des magazines populaires de ces rayons de super marché...
      finbon !
      bref
      à la limite
      dans une optique idéologique intégriste non-capitaliste (Thomiste ou Communiste)
      il m'apparaît que les freins sociologiques que rencontrent les femmes dans les entreprises capitalistes, lamentables de bêtification de masse, sont en fait paradoxalement des garants de sainteté...
      nan parce que sans dec : vous avez vraiment besoin de ces magazines pour réfléchir avec lucidité au monde qui vous entoure ?
      moi
      non

      Supprimer
    3. Pour le coup, Causette est loin d'être opportuniste : son fondateur a dû emprunter sur ses deniers personnels pour se lancer, personne ne voulant entendre d'un magazine féministe. Et il est sans pub, donc question "vendu au grand capital", on repassera. Quant à dire que finalement les freins qui bloquent les femmes les empêchent de faire des choses compromettantes (comme gagner du fric ou de la gloire), je ne suis pas du tout d'accord. Ca revient à dire "ah les femmes ces saintes, ne sont pas intéressées par l'argent et la réussite" et indirectement à les cantonner à des postes de petite envergure ou dans les domaines du "care" (aide à la personne, enseignement, mais aussi dans le domaine privé). Ca me fait penser indirectement à la chanson sur Thatcher de Renaud dans laquelle les femmes sont présentées comme des êtres purs, pacifiques et sensibles alors que les hommes sont des brutes épaisses assoiffées de sang.

      Supprimer
  8. Merci pour ces précisions. Merci aussi de m'avoir répondu calmement et intelligemment sans refuser un commentaire qui n'allait pas totalement dans le sens de votre texte (je précise au passage que je vous lis régulièrement sans commenter et en étant d'accord avec l'essentiel de vos articles, d'autant que je suis un peu dans la même situation que vous : mère, féministe, et auto-entrepreneuse). C'est vrai que j'ai été maladroite en écrivant : ""personne n'empêchait une femme de le faire", d'autant que je suis tout à fait consciente des freins sociologiques. Mais à l'heure actuelle, voilà, le magazine a eu du succès, la voie est libre pour la concurrence. A l'heure actuelle, aussi, des femmes dirigent des magazines (la plus récente est sans douce celle qui co-dirigent le nouveau "Lui" avec Beigbeider), sont-elles vraiment incapables de créer un magazine à leur image ? Enfin comme je l'avais écrit pour le patron de Causette, ce magazine était son idée. Si un inventeur masculin trouvait un moyen d'améliorer la cause de la femme, devrait-on critiquer son invention uniquement parce que l'auteur est un homme ?
    Quoi qu'il en soit, je suis d'accord avec l'idée selon laquelle les hommes ne peuvent pas vivre les expériences exactement comme une femme, etc., je ne la critique pas du tout. Mais j'ai aussi l'impression qu'un certain nombre de femmes, cloisonnées dans une éducation sexiste, peuvent être bien pire que des hommes.
    Pour l'anecdote, hier, alors que j'allais acheter mes cigarettes, une femme demandait des piles pour une lampe électrique. La buraliste les lui donne. Là elle demande : "vous savez comment on les met ?" Derrière elle, un homme dit : "pour faire ça, il vous faut un homme", il le fait, pendant ce temps là buraliste dit :"ah c'est vrai qu'en temps que femme, on a beaucoup de lacunes".
    J'étais presque plus consternée par la buraliste que par le type, d'autant qu'il avait l'air (peut-être) de faire de l'humour en proposant son aide, alors que la femme buraliste répondait sincèrement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tant que le commentaire est non insultant et argumenté, je n'ai aucune raison de le refuser ou de ne pas y répondre! (il est très rare que je supprime des commentaires d'ailleurs).
      Concernant le sexisme, je confirme qu'il peut être tout à fait intériorisé par les femmes à tel point qu'elles peuvent être parfois aussi macho que les hommes! J'ai d'ailleurs donné en lien plus haut dans les commentaires 2 billets dans lesquels j'aborde cette problématique.

      Supprimer
  9. J'ai l'impression, personnellement, que "le macho à la tête de" est une exagération journalistique bien opportune. Avant le film de Kitty Green, il y a eu plein d'autres films sur les Femen (on peut encore les voir sur Arte, entre autres) et il n'y a jamais été question de ce type.
    Anna Houtsol a elle-même raconté depuis le début qu'elle est la fondatrice du mouvement. Elle voulait faire partie d'une association d'étudiants mixtes à Kiev mais elle a vu que l'on n'y prenait pas les femmes au sérieux. Elle a donc créé un groupe de femmes. Son "erreur" a été d'y accepter des hommes. Alors, bien sûr, le machisme s'y est réinstallé via un homme. Mais quand on lit la presse reprendre les qualificatifs dont ce bonhomme aurait affublé les Femen, on finirait par croire qu'elles n'ont absolument rien fait d'elles-mêmes et qu'elles sont comme il dit (des faibles, des salopes). Or quand elles sont interviewées aujourd'hui comme hier, et pas seulement en France, car elles sont quand même très représentées à travers le monde, elles parlent avec leurs propres mots et exposent leurs propres idées qui sont très intelligentes car elles viennent d'un pays soumis à une dictature, cela te forme une femme, politiquement ! Elles n'ont pas appris de leçon par coeur. Je ne vois pas où est l'homme là derrière, personnellement. De plus, étant donné comment les services secrets ukrainiens l'ont arrangé, je ne crois pas qu'il va être opératoire avant longtemps !
    Les Femen le disent elles-mêmes, elles se sont faites avoir un moment donné mais entre temps elles ont évolué. Il ne faut pas oublier leur extrême jeunesse.
    Au temps des suffragettes, des hommes aussi ont apporté leur aide moral, matériel, pratique, tout aux activistes de rue. Moi, je ne crois pas qu'il faille totalement écarter les hommes du féminisme mais être très vigilantes, ça oui.
    La presse donne solidement l'impression de vouloir à tout prix discréditer le mouvement Femen jsutement parce qu'il fait sans arrêt des émules et se développe dans le monde entier. Il y a maintenant Femen Mexique, hier s'est créé Femen Pakistan, les Femen sont partout. Moi je connais un peu (de loin) le groupe Femen Germany et, d'après ce que j'en sais, elles ne souhaitent pas céder au matraquage anti-femen auquel a cédé Amina toute seule en Tunisie (et en prison).
    Je pense que ce groupe est en pleine évolution et plus il est fort, plus il est attaqué.
    Il n'y a qu'à voir le nombre d'articles que le magazine Elle publie à leur sujet pour les vendre comme agressives, ridicules, inutiles, etc... ! Dans son dernier article, ELLE pose la question récurrente "faut-il manifester seins nus" avec comme réponse NOOOONNN !!! comme si personne n'avait encore remarqué qu'elles font un tel tabac avec ce procédé qu'une intellectuelle chinoise de 60 ans l'a dernièrement repris pour protester et que les sages-femmes de la maternité des Lilas se sont mises nues hier pour les mêmes raisons.


    Pour ma part, je suis convaincue qu'elles sont l'avenir du féminisme.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. pour être "l'avenir du féminisme", il faudrait déjà qu'elles le soient...

      Supprimer
    2. Même si j'en comprends bien les raisons énoncées... une volonté de "non mixité" du féminisme me dérange.

      Pour moi, ça me fait penser aux "clichés" de "les riches votent à droite" et "les pauvres votent à gauche". Pour ma part, je suis communiste (même si pas au Parti, parce que j'ai du mal avec certaines de leurs propositions). Pour moi, un idéal ne peut pas être que l'affaire du groupe concerné. Ne voterait-on par exemple que pour le parti politique qui nous est le plus favorable ? La lutte contre le racisme n'est-elle que l'affaire des noirs ?

      Verrouiller les groupes de luttes à la seule population concernée forme un communautarisme qui me paraît au mieux risqué, et au pire contreproductif.

      Veiller à ne pas reproduire une domination masculine dans les groupes féministes, c'est une chose. Mais en arriver à la non-mixité ?

      Je suis tout à fait conscient que mon statut d'homme fera que je ne pourrais jamais vivre ce que vivent beaucoup de femmes. Mais scinder la population en "homme"/"femme" n'est pas forcément toujours pertinent : nombre de femmes sont bien plus néfastes et farouchement opposées quant à la cause féministes que les hommes qui soutiennent ce mouvement. Ou bien sommes-nous (hommes) tous hypocrites ?

      Le féminisme implique (à mon sens en tous cas) autant un changement des mentalités de la part des femmes que des hommes. Comment mieux sensibiliser les deux qu'en offrant des symboles des deux sexes visibles par tous ?

      Il faut veiller à ne pas reproduire un quelconque patriarcat au sein des mouvement féministes, ça c'est une évidence. Mais le contraire de patriarcat n'est pas une absence d'hommes à mon avis. Et aussi bien parmi les sympathisants que parmi les militants.

      Supprimer