> J’ai lu « Merci pour ce moment »

mardi 9 septembre 2014

J’ai lu « Merci pour ce moment »



Et j’assume. Même en tant que fille de libraire.

Je trouve d’ailleurs la « fronde » des libraires totalement déplacée. Depuis quand sont-ils les maîtres étalons du bon goût littéraire ? Faut-il leur rappeler que les meilleures ventes sont Musso, Levy et pas la Pléaide ? Et l’ont-ils seulement lu ?

Pourquoi boycotter le livre de Valérie Trierweiler et pas celui de Marcela Iacub ou de Loana ? Comme le tweetait pertinemment Corinne Perpinya, libraire elle-même, « Je n'avais jamais vu sur une porte de librairie un truc aussi "engagé" pour un livre de Zemmour… Comme quoi, les fachos ça dérange moins… ».

Je l’ai lu donc.

D’un point de vue stylistique, le livre ne présente aucun intérêt. Du point de vue des ragots croustillants non plus puisque les meilleures phrases ont déjà été publiées. Pour ma part, j’avoue que connaître l’intimité du Président ne m’intéresse pas plus que ça. Ca me gênerait même presque autant que si mes parents me racontaient leur vie sexuelle. Le livre n’a de toute manière pas changé mon opinion sur Hollande, que je ne tenais pas en haute estime jusque là. Et puis, selon moi, être un mauvais mari n’implique pas forcément qu’on soit un mauvais président (il ne resterait plus grand-monde de convenable à ce compte là).

En revanche, je trouve le livre passionnant dans ce qu’il dévoile des tréfonds de l’âme humaine. La résilience, l’égocentrisme, la manipulation, l’égo, le narcissisme : tout est dit. Ce qu’on y découvre des coulisses du pouvoir est également captivant : l’entre soi, l’élitisme, les manipulations, les coups bas, la comm’pol’… Et en plus c’est une femme, journaliste politique, qui nous le raconte, fait suffisamment rare pour être mentionné. 
Quand elle rencontre Michelle Obama, Valérie Trierweiler regrette : « J’aimerais tant avoir une vraie conversation avec elle. Sous son masque parfait, je donnerais cher pour savoir ce qu’elle pense de sa vie de first lady, avec ses contraintes bien plus importantes aux États-Unis qu’en France, mais jouissant d’un véritable statut. ». Voilà en effet qui aurait été fort intéressant. Mais ce n’est pas l’objet du livre et c’est bien dommage.

J’ai beaucoup apprécié également de découvrir le parcours de « self-made woman » de Valérie Trierweiler, issue d’un milieu modeste et à qui Bernard Tapie aurait lancé « Vous n'allez pas me dire qu'elle est énarque, avec la gueule qu'elle a ! ». Sa trajectoire force l’admiration et peut, de fait, avoir valeur d’exemple pour beaucoup de jeunes femmes qui manquent souvent de modèles. Sans doute plus inspirant que les héroïnes de télé-réalité.

Féministe donc le livre de Valérie Trierweiler ? Je sais que de nombreux magazines vont sauter sur le sujet en délivrant ou retirant des brevets de féminisme à tour de bras, je me garderais bien pour ma part de m’aventurer sur ce terrain. « Je suis seule. Vraiment seule. Pas une voix de femme, pas même une féministe pour me défendre. » déplore l’auteure. En ce qui concerne le traitement médiatique réservé à l’ex-première dame, je me souviens pourtant avoir vu passer de nombreuses réactions sur Twitter, des billets de blogs, des articles sur le site « Les Nouvelles News » dénonçant les couvertures sexistes ou racoleuses.  Mais peut-être n’est ce pas assez médiatisé pour Valérie Trierweiler. 

En ce qui concerne la vie privée de l’ex-première dame, j’estime que les féministes n’ont pas à monter au créneau à chaque fois qu’un mari trompe sa femme (je m'étais déjà exprimée à ce sujet quand on me l'avait reproché). D’autant que les féministes ont dû être, comme moi, très amusées (doux euphémisme) d’apprendre le choix suggéré par Valérie Trierweiler pour le ministère des Droits des femmes : « Je suis dans la confidence pour le nom du futur Premier ministre, ainsi que pour quelques ministres. (...) Je me contente de suggérer un nom qui ne sera pas retenu. Il s'agit de Valérie Toranian, directrice du magazine Elle, pour le ministre des Droits des femmes. Je la connais peu, mais je trouve que cela aurait eu du sens et de l'allure, une nouvelle Françoise Giroud ».  

Ce choix a de quoi faire rire,  autant que si on nommait le rédacteur en chef de Minute Délégué Interministériel à la Lutte contre le Racisme et l'Antisémitisme.

Mais les choses ont changé depuis et il est fort probable que Valérie Toranian ne soit plus dans les petits papiers de Valérie Trierweiler depuis cette couverture.



Pendant ce temps là, Françoise Giroud doit faire des saltos arrières dans sa tombe.






14 commentaires:

  1. J'en suis à peu près à la moitié et j'ai le même sentiment que toi. Rien de bien croustillant, pas super bien écrit. Les flashbacks dans les flashbacks dans les flashbacks ne rendent pas la lecture très facile.

    Par contre c'est très révélateur sur les relations entre les politiques et les journalistes. Elle n'en fait pas le centre de son livre, vu qu'elle ne connait que ça depuis 25 ans, mais pour nous aut' les gens du peuples, c'est assez frappant : et que les journalistes invitent les politiques à déjeuner, et que les politiques invitent les journalistes à déjeuner, et que les politiques choisissent leur harem de journalistes préférés, les reçoivent en causerie privée après les conférences de presse, les invitent aux déplacements officiels...

    Il y a un espèce d'écosystème endémique, auquel je pense que l'on peut ajouter les femmes et hommes d'affaire (cf le passage avec Tapie, pas encore en politique à ce moment-là) qui me débecte un peu. Le fait que ces sphères-là que nous n'avons pas choisies soient aussi près du pouvoir doit pas mal participer au rejet de la classe dirigeante.

    Vu le succès du bouquin, le sentiment de "tous pourris, ils bouffent ensemble, couchent ensemble" risque d'être encore renforcé.

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    1. Absolument...et tout ça fait le lit du FN malheureusement...

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  2. J ai lu le livre également. On m'a critiqué le fait de avoir acheté ce livre mais je ne regrette pas. Je suis heureuse de voir que je partage les même impressions que toi. Je me suis mise à sa place tout le long du livre et j ai vraiment eu l impression qu elle a souffert et souffre encore de cet amour. D ailleurs cela se sent qu elle est toujours amoureuse...

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  3. Cela s'appelle de la consanguinité ...
    Les enfants deviennent soit journalistes soit politiciens et couchent ensemble , ce qui augmente encore le taux de consanguinité , et ainsi de suite ... Et puis on arrive à deux castes qui collaborent et contrôlent l'opinion pour le meilleur des mondes ...

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  4. je ne l'ai pas lu, car je n'en ai pas l'envie :)
    j'ai écouté et j'ai trouvé que les extraits donnaient vraiment dans l'outrance ;
    et une question me taraude, s'il était aussi machiavélique qu'elle le décrit, comment a t elle pu l'aimer et le supporter pendant ces années ;
    quant à ces croisement presse- pouvoir, ils accentuent le malaise qu'on ressent partout

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  5. Comme toi, je ne comprend pas le political bashing autour de ce livre... (oui, toi aussi utilise des mots anglais non traduits!^^) même si je suis pas fan de cette démarche à la base, c'est un peu hypocrite de se mobiliser contre ce bouquin, et pas zemmour ou d'autres. Comparer à Françoise Giroud, hahaha! comment casser quelqu'un en pensant lui faire un compliment... Sinon, il y avait aussi Antoinette Fouque :)

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  6. C'est sur Rue 89 je crois que j'ai lu un article qui disait que le livre présentait un certain intérêt d'un point de vue politique, d'autant plus intéressant qu'il a été écrit par une journaliste politique qui a connu le milieu de l'intérieur ce qui n'arrive pas tout les jours. Mais bon ce n'était pas le but premier de l'auteure. C'est pas pour autant que le boycott de son livre est justifiable.

    Si j'ai l'occasion de le lire je le lirai, je ne m'en cache même pas vis à vis de mon entourage. Je ne vois pas pourquoi je le ferai d'ailleurs . ce n'est pas ce livre qui changera quoi que ce soit à ma vision du président et du gouvernement en général.

    Un jour je me suis demandé si Valérie Trierweiler était féministe, je ne sais pas et avec du recul je ne sais pas si c'est utile de savoir par contre s'il y a un point sur lequel j'ai toujours été d'accord avec elle c'est concernant son désir de continuer à travailler dans la presse pendant qu'elle fréquentait François Hollande. Je trouve qu'elle a eu raison pour ça. Pourquoi une femme devrait dans ces cas là s'enlever de la tête toutes idées de carrière professionnelle et se consacrer à "la parade." Je ne dis rien concernant le poids qu'elles peuvent peser dans les œuvres de charité qu'elles s'occupent dés lors mais de là à ne faire que ça, à être sans cesse dans l'ombre de son compagnon non. Je me suis demandé lors de la rupture si cela n'avait pas joué.

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  7. C'est sur Rue 89 je crois que j'ai lu un article qui disait que le livre présentait un certain intérêt d'un point de vue politique, d'autant plus intéressant qu'il a été écrit par une journaliste politique qui a connu le milieu de l'intérieur ce qui n'arrive pas tout les jours. Mais bon ce n'était pas le but premier de l'auteure. C'est pas pour autant que le boycott de son livre est justifiable.

    Si j'ai l'occasion de le lire je le lirai, je ne m'en cache même pas vis à vis de mon entourage. Je ne vois pas pourquoi je le ferai d'ailleurs . ce n'est pas ce livre qui changera quoi que ce soit à ma vision du président et du gouvernement en général.

    Un jour je me suis demandé si Valérie Trierweiler était féministe, je ne sais pas et avec du recul je ne sais pas si c'est utile de savoir par contre s'il y a un point sur lequel j'ai toujours été d'accord avec elle c'est concernant son désir de continuer à travailler dans la presse pendant qu'elle fréquentait François Hollande. Je trouve qu'elle a eu raison pour ça. Pourquoi une femme devrait dans ces cas là s'enlever de la tête toutes idées de carrière professionnelle et se consacrer à "la parade." Je ne dis rien concernant le poids qu'elles peuvent peser dans les œuvres de charité qu'elles s'occupent dés lors mais de là à ne faire que ça, à être sans cesse dans l'ombre de son compagnon non. Je me suis demandé lors de la rupture si cela n'avait pas joué.

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  8. La seule raison pour laquelle j'aurais envie de lire ce bouquin est de me faire une idée sur le caractère de narcissisme de Hollande dont il semble qu'elle la révèle, puisque tous les avis convergent, ça n'est pas un livre politique. Le sujet m'intéresse globalement à titre personnel, donc ça m'intrigue. Bien que comme le signalait à juste titre un journaliste politique, le modèle même de sélection à la présidence ne peut que retenir des candidats hautement narcissiques, il est fait comme ça. Mais j'ai aussi et surtout envie de me tenir loin de tout ça, et des "mauvaises ondes" que semble contenir ce livre. Ce qui me frappe, c'est tout de même un manque de distance et de centrage. Quand je vois qu'un membre de sa famille ne décolère pas parce qu'elle rapporte une raillerie, je trouve qu'elle aurait pu protéger un peu ses proches, et que ça ressemble fort à un "regardez comme il est méchant, dites, dites", un peu enfantin. Elle vient d'un milieu simple, et de tout évidence, la blessure reste à vif (je peux le comprendre, mon père a travaillé à 14 ans, et ça reste un sujet sensible, mais bon, il n'écrit pas de bouquin pour dire à la terre entière que tout le monde est méchant avec lui), il aurait peut-être fallu y penser avant de se lancer à l'assaut des énarques. Après tout, ce genre de sale blague,(de mémoire : "elle est pas jojo la famille Massoneau"), j'aurais pu la faire à mon mari en sortant d'une réunion de famille, mais jamais je ne serais allée blesser des proches avec ça. Et j'avoue que j'imagine le ton sur lequel ça a pu être dit, ça me fait rire, c'est tout, et si ça reste dans l'intimité, ça n'est pas bien grave. Le rendre public et blesser son entourage me semble plus ennuyeux par contre. Donc définitivement, je n'ai pas envie de recevoir cette salve de colère qui ne me semble absolument pas distanciée. Et à ce titre, je m'en tiendrais à la rubrique de François Rollin, un supplément de dignité sur Rue 89 : http://bo.rue89.nouvelobs.com/zapnet/2014/09/09/formidable-chronique-francois-rollin-trierweiler-sans-jamais-citer-254731

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  9. Sur les liens entre journalistes et politiques, vous pouvez regarder l'excellent documentaire : Les nouveaux chiens de garde....
    Je crois même que c'est tiré d'un livre du même nom.

    C'est édifiant.

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  10. Pardon Sophie, j'y reviens. Décidément ce bouquin me dérange, je vais aller au fond des choses et dire pourquoi, et peut-être le lire pour me faire une opinion. J'ai dénoncé un jour un de mes managers aux RH de ma boîte, un pervers narcissique avec lequel j'ai fini par avoir une liaison, je leur ai dit également. J'en ai parlé en démissionnant (j'assumais ma responsabilité et le fait de ne pas pouvoir changer une structure) car j'ai jugé (et la RH également, sur le coup, avant que son chef ne s'en mêle) ses actes suffisamment graves pour les dénoncer, pour que ça ne se reproduise pas. En pleine abrogation de la loi sur le harcèlement, je ne pouvais pas porter plainte, je ne l'aurais pas fait, j'avais trop honte. Et crois moi, j'étais certes sous le coup de la colère et d'un tsunami personnel sans nom, mais j'ai pesé mon jugement et mon acte pendant des jours, et je l'ai payé pendant de années. Voilà. Alors j'espère que dans le fond, les actes de cet homme sont réellement graves pour mériter une telle mise au pilori, et pour ce que j'en lis parfois, la qualification de pervers narcissique, car dans le cas contraire, elle ne sert pas la cause des femmes ni aucune cause d'ailleurs, mais elle renforce la vision de la connasse hystérique qui n'assume rien, vision déjà fort bien ancrée par ailleurs qui ne mérite nullement d'être renforcée.
    Pardon, c'était probablement violent, la blessure date de 3 ans mais est encore à vif, je m'en rends compte.

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  11. Je t'avoue que j'ai beaucoup de mal avec le refrain "elle dessert la cause des femmes". Est-ce que quelqu'un a déjà dit que DSK desservait la cause des hommes, alors que les actes étaient éminemment plus graves? Par ailleurs, je ne pense pas que le bouquin ait pour vocation de représenter toutes les femmes, il suffit de le lire pour se rendre compte qu'on ne fait pas partie du même monde (y a pas beaucoup de femmes trompées qui ont le luxe de partir en voyage humanitaire pour se changer les idées par exemple). Oui le harcèlement est une chose grave, qu'il faut dénoncer mais je t'avoue que je ne vois pas trop le rapport avec le bouquin de Trierweiler.

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  12. Tu sais quoi, après (mûre) réflexion, tu as raison absolument sur l'analogie avec DSK. Et les gens sont dotés d'un libre arbitre, ils peuvent juger ce qui relève du caractère fondamentalement manipulateur de la part d'un homme (parce que ce que je crois lire un peu partout c'est qu'il n'est pas ce qu'il semble être, que c'est une manipulateur de première) de ce qui relève d'une dénonciation (que je trouve manipulatrice) sous le coup de la colère. Je te prie de m'excuser d'avoir utilisé ton site pour digérer mes aventures personnelles :-) Je te demanderais presque d'annuler le comm précédent qui me semble parfaitement caduque.

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  13. Je veux bien ne pas forcément participer à la descente en flèche de son bouquin, mais si elle veut devenir une icône féministe, il serait pour moi important qu'elle se serve d'autres chose que de sa vie de couple et de son ancien statut pour écrire un bouquin. On peut dire ce qu'on veut de celle qui l'a précédée et qu'elle a merveilleusement soutenu par tweeter (sûrement une belle marque de solidarité féminine, ici), mais au moins, elle, elle s'est vraiment engagée en politique et n'a jamais eu besoin de son époux comme faire-valoir!

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