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lundi 20 janvier 2014

IVG : notre corps nous appartient, plus que jamais




Mes détracteurs me reprochent souvent de ne pas parler des « vrais sujets » sur le blog.

Le marketing genré, le sexisme dans la publicité, les stéréotypes véhiculés dans les livres ou la publicité à destination des enfants tout cela n’est pas important. Il y a des combats toujours plus prioritaires, comme les femmes afghanes ou les femmes violées (voire les femmes afghanes violées).

Une fois n’est pas coutume, je vais donc aborder un « vrai » sujet aujourd’hui : la remise en question du droit fondamental à l’IVG.

Aujourd’hui encore, rien n’est acquis en dépit des avancées féministes.

L’Espagne, comme la plupart des pays européens, autorisait jusqu’ici l’interruption volontaire de grossesse jusqu'à 14 semaines (et jusqu'à 22 semaines en cas de malformation du fœtus). Un projet de loi remet aujourd’hui ces acquis en question : l’IVG ne sera possible que dans 2 cas : en cas de viol - après présentation d'une plainte déposée à la police -, et en cas de danger pour la santé physique ou psychique de la mère - si ce risque est attesté par un rapport signé par deux médecins indépendants. Dans toutes les autres situations, l'IVG serait refusée, même en cas de malformation du fœtus.

En France, on apprend aujourd’hui que certains membres de l’UMP (dont bon nombre d’entre eux s’étaient déjà prononcés contre le mariage pour tous) ont déposé un amendement visant à dérembourser l’IVG « «Si la notion de détresse est supprimée dans la définition de l'interruption volontaire de grossesse, les conditions de remboursement de l'acte par la sécurité sociale ne sont plus remplies» expliquent les signataires du texte. Une position qui a été également soutenue par le Front National en 2012 : « Si j'ai un choix à faire, j'assumerai le choix de rembourser plutôt les radiographies abdominales pour les personnes âgées, les médicaments pour les personnes âgées...» déclarait ainsi Marine Le Pen.

Un discours dans la droite lignée de son père qui affirme aujourd’hui dans le Parisien que « les femmes doivent assumer leur fonction de reproduction ».

Et que dire de François Fillon qui déclare aujourd'hui que la réecriture de la loi Veil est "une faute morale qui risque de banaliser l'avortement?"

Un retour en arrière qui fait froid dans le dos. Quelle sera la prochaine régression ? L’interdiction d’exercer une profession sans l’accord du mari (acquis de 1965) ? Le déremboursement de la pilule (acquis de 1974) ?

Hier, en réponse à la manifestation anti-IVG (et non pas « pro-vie », les mots sont importants), 600 personnes se sont réunies place d’Italie à l’initiative de Dariamarx et Crêpe Georgette. Une contre-manifestation qui n’a été que peu relayée par la presse ou les sites web : il est sans doute plus rentable en terme de clics (et donc de revenus publicitaires) de mettre en avant des extrémistes aux slogans nauséabonds. Quand la rentabilité oriente la ligne éditoriale…

Voici quelques images de la manifestation: 





Ainsi qu’une vidéo:



Une autre manifestation est prévue le 1er février à 14h devant l’ambassade d’Espagne, toutes les informations sont disponibles ici.

En attendant de préparer ses banderoles, voici quelques chiffres qui remettent les idées en place :

-       222.500 avortements ont été réalisés en France, un nombre quasi stable depuis 2006 après dix ans de hausse. «Le nombre d'IVG n'a pas augmenté non plus au cours des derniers mois de 2012», précise la Drees. (1)

-       «Le nombre d'IVG, y compris chez les plus jeunes, ne s'explique pas principalement par un défaut de couverture contraceptive», souligne la Drees. En 2010, 91% des Françaises sexuellement actives, âgées de 15 à 49 ans, déclaraient employer une méthode contraceptive. Et en 2007, deux femmes sur trois qui ont eu une IVG utilisaient une méthode contraceptive, qui n'avait pas fonctionné en raison d'un oubli de pilule ou d'un accident de préservatif. (2)

-       Le droit à l'avortement encore limité dans les trois quarts des pays : Dans une majorité de pays, la loi n'autorise l'avortement que dans des conditions exceptionnelles : lorsque la vie de la mère est menacée (possible dans 98 % des pays) ou lorsqu'il y a un risque pour la santé physique ou mentale de la mère ou de l'enfant (68 %). Seuls 56 pays (28 %) permettent les interruptions de grossesse non motivées, en accompagnant en général ce droit d'un délai (par exemple, en France, la grossesse ne doit pas dépasser 12 semaines). (3)                                                     

-       En 2005, l'OMS considère que 48 % des avortements provoqués (20 millions) sont pratiqués dans de mauvaises conditions - personnel non qualifié, mauvaise hygiène, grossesse trop avancée - entraînant la mort de près de 70 000 femmes et des complications graves pour des millions d'autres. Près de 97 % de ces avortements à risque sont pratiqués dans des pays où l'avortement est interdit ou très limité. (4)



« Rien n’est jamais définitivement acquis.
Il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que
les droits des femmes soient remis en question.
Votre vie durant, vous devrez rester vigilantes »
Simone de Beauvoir


A lire également sur le sujet:
- L'article de Dom Bochel Guégan
- Le billet de Camille Sexpress



9 commentaires:

  1. Rien à ajouter, cette manif en France était une honte, une de plus à l'actif des "pour tous"...

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  2. la honte...
    ben je connais ça depuis très longtemps : je vis chez ma mère qui fait partie de ces gens anti ivg...
    et par expérience, je sais qu'il est impossible de leur faire comprendre quoi que ce soit... sans compter qu'en situation de dépendance économique, on peux que s'écraser.
    or
    comme par hasard
    ces gens correspondent aussi à ceux qui se font passer pour la classe culturelle supérieure en tout.
    donc les autres sont en dessous
    et n'ont qu'à souffrir, entre autre, de naissances non désirées, ou inassummables compte tenu de la misère de leur situation
    ces gens là aussi, quelque part, je me demande s'ils n'y a pas chez eux un certain sadisme à imposer aux autres des conditions de vie comme des lois pour les faire souffrir...

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  3. Et en Suisse un groupe mi-évangéliste, mi-extrême droite essaye de remettre en cause le remboursement des avortements par l'assurance-maladie de base en faisant planer le risque du retour de l'avortement clandestin ! http://ladentdure.wordpress.com/2013/12/14/touche-pas-a-mon-avortement/

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  4. Je viens juste de faire un post dessus ! Je suis choquée ! C'est honteux. Comment des personnes extérieures peuvent juger et imposer une situation ! Cette société est de pire en pire ! On nous interdit tout ! On veut tout nous retirer ! Laissons nous le choix ! C'est pas possible... On fait un bond en arrière... 1975 ! C'était une date clé, ces gens qui remettent ça en cause sont restés dans le passé ! Il est temps d'atterrir !

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  5. Je n'habite plus en France depuis maintenant longtemps mais j'y suis née et y suis restée jusqu'à mes 20 ans, en 2000 donc. J'ai eu juste envie de hurler en découvrant les infos hier. Alors à tous ces braves gens anti-IVG j'ai envie de dire qu'il y a de la route à faire et des oeillères à enlever (et des chapelets à balancer dans des tronches). Alors en vrac, comme ça me passe par la tête:

    Merci Sophie d'avoir rédigé ce post déjà, puisqu'ils veulent en parler, et bien qu'on en parle!

    Quand je vois qu'on traîne des gosses dans une manif comme celle-ci, j'ai envie de gerber
    Quand je vois qu'on prend n'importe quel prétexte pour déverser sa haine de soi et des autres, j'ai envie de gerber.
    Quand je lis qu'il faut "responsabiliser les femmes", (oui Marion Maréchal, c'est à toi que je m'adresse), j'ai envie de gerber. Une telle affirmation c'est cracher sur les femmes en impliquant qu'elles sont dénuées de cerveau et de sentiments. C'est cracher sur les hommes en leur refusant la part de responsabilité que beaucoup, je l'espère, ont envie d'avoir. C'est donner une occasion de retourner en mode vieille bourgeoisie bigotte: tu l'as mise enceinte, tu l'épouses. A quand le retour aux mentalités des années 30, où une fille-mère était une fille "perdue"?

    Quid de la masturbation avec intention de tuer ses spermatozoïdes qui auraient pu contribuer à faire naître un enfant? Quid de la pilule supposée protéger d'une grossesse non désirée en stoppant l'ovulation? Non mais supprimons-les et prions pour que les lobbies des fabricants de latex viennent sauver leur bout de gras.

    Comment peut-on accuser une femme et son/sa partenaire de considérer l'avortement comme LA solution de confort? Parce que c'est marrant d'aller à l'hôpital, selon ces gens? C'est marrant de se demander toute sa vie à quoi aurait ressemblé l'enfant qu'on n'a pas pu garder à ce moment précis de sa vie?

    Ne faudrait-il pas plutôt commencer à parler de "ces choses" dans les écoles, et correctement, pas se limiter à un papa et une maman, non? Ne faudrait-il pas arrêter de considérer de rabaisser les hommes qui souhaitent rester au foyer se consacrer à leurs enfants? Ne faudrait-il pas arrêter de culpabiliser les femmes en leur reprochant d'aller travailler alors qu'un seul salaire souvent ne suffit plus? Ne faudrait-il pas envisager que l'avortement n'est légal que depuis 40 ans, mais pratiqué depuis des centaines d'années? Mortalité des femmes, conditions d'hygiène non respectées, mortalité des nourrissons, ça on l'oublie? Moi je ne comprends plus ce pays!

    Je trouve triste à pleurer qu'on souhaite limiter l'avortement au seul viol (attention, hein, selon certains, il y a viol et viol, ne pas confondre) en espérant que les femmes qui trop souvent se taisent pour les raisons que nous ne connaissons que trop bien, se décident à porter plainte le jour même pour ne pas détruire les preuves et y retournent quelques semaines plus tard pour annoncer leur décision d'avorter. La police n'étant pas du tout débordée, tout se passera sûrement très vite et très bien... Quant au danger physique ou psychique pour la mère, il me semble que ces critères sont déjà contenus dans le contexte sémantique du viol entre autres.

    On oscille chez eux entre les Thénardier et Alice au Pays des Merveilles pour le côté hallucinant de cette manif honteuse. J'aimerais bien que tous ces braves gens se regardent avant d'ouvrir leur gueule pour supprimer les droits acquis par nos parents. Accessoirement, qu'ils googlent jurisprudence, mot de code embryon. Bref, ça m'énerve. Qu'ils retournent donc dans leur obscurantisme en nous laissant le choix de ne pas les suivre.


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  6. Petite erreur dans le billet (pas bien grave, mais erreur tout de même): C'est JMLP qui à balancé que " les femmes doivent assumer leur fonction de reproduction ", et pas son héritière.

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  7. J'ai également fait un article sur le sujet, voudrais-tu bien me donner ton avis? J'adore ton blog et ça conterait pour moi ; Voici le lien si tu as le temps:
    http://impensablespensees.wordpress.com/2014/01/18/est-ce-que-je-me-mele-de-ce-que-tu-fais-de-ton-corps-moi/

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  8. J'aime le style d'écriture. J'aime l'initiative Web aussi du blog sans compromis. Le sujet du féminisme en revanche est stérile. Aucune planète ne grossira plus que le soleil. C'est la nature, il en va de même pour l'homme et la femme.

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