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mercredi 4 juin 2014

Elles osent! Entreprendre au féminin : Charlotte Allibert et Laure Prételat de Librinova


Aujourd'hui, j'accueille avec plaisir Charlotte Allibert et Laure Prételat, fondatrices de Librinova, le partenaire de notre jeu d'écriture (vous avez jusqu'au 16 juin pour participer!).


Bonjour Charlotte & Laure, pouvez-vous nous parler de Librinova?

Charlotte : Bonjour Sophie ! Librinova, que nous avons lancé en février 2014, est né d’un constat simple que nous avons fait alors que nous travaillions ensemble dans une maison d’édition : il y a en France de très nombreux auteurs et très peu ont la chance d’être publiés. Or, le livre numérique, qui est en plein essor depuis 2010, offre de nouvelles possibilités aux auteurs et facilite la publication.

Laure : Nous avons créé Librinova avec 3 objectifs : démocratiser l’accès à la publication, créer une passerelle entre l’autoédition et l’édition traditionnelle – dont nous venons et à laquelle nous sommes très attachées et enfin, proposer aux auteurs une offre transparente et sans entourloupe.

Charlotte : Le principe de Librinova est simple : les auteurs peuvent déposer leur manuscrit sur le site et, en quelques clics, il est transformé en livre numérique et commercialisé sur plus de 90 sites libraires (dont Amazon, Apple et Kobo). Cette formule coûte 50 ou 75€ en fonction de la taille du manuscrit et nous versons ensuite à l’auteur 100% des revenus nets de ses ventes jusqu’à la 1000ème, puis 90%. Nous proposons également des services éditoriaux, graphiques, promotionnels et d’impression. Enfin, à partir de 1000 ventes, l’auteur rejoint un programme appelé « En route vers le papier » qui est un peu notre écurie d’auteurs prometteurs ! Nous boostons leur communication et nous les accompagnons, s’ils le souhaitent, dans leur recherche d’un éditeur traditionnel pour une publication papier.

Qu’est ce qui différencie Librinova des autres maisons d’auto-édition ?

Charlotte : La première chose que nous essayons de mettre en avant, c’est que, chez Librinova, il s’agit bien d’autoédition. Nous ne nous présentons pas comme une maison d’édition - comme peuvent le faire certains – et essayons d’être claires et transparentes avec les auteurs. Chez nous, ils payent pour une prestation fixe : la création et la commercialisation de leur livre numérique. Ils touchent ensuite l’intégralité des revenus générés par leur ventes (c’est à dire leur prix de vente moins la TVA et la commission des libraires), car leur succès dépend d’eux et de la qualité de leur livre. Nous ne sommes que l’outil qui leur permet d’accéder à un lectorat.

Laure : Néanmoins, nous prenons soin de nos auteurs, et c’est pourquoi nous avons créé « En route vers le papier ». Pour la plupart des auteurs, voir son livre en librairie est un rêve, et nous essayons de leur permettre de le réaliser. Je crois pouvoir dire que les liens que nous entretenons avec les éditeurs – de part nos expériences professionnelles passées – sont uniques.

Charlotte : Un autre point important est que nous avons la diffusion la plus vaste du marché : plus de 90 sites libraires, un bon moyen pour les auteurs de toucher un lectorat très large.

Laure : J’en ajoute un dernier : le site est conçu pour que ce soit facile. Pas besoin de s’y connaître en informatique pour publier son livre !


Quel a été votre parcours avant de vous lancer dans l’entreprenariat ?

Charlotte : Mon parcours pré-Librinova est un peu court… J’ai fait HEC, dont je suis sortie en 2010 après avoir fait la Majeure Entrepreneurs en dernière année. L’idée de monter ma boite me travaillait déjà à ce moment là, mais je voulais d’abord avoir une expérience significative dans un secteur qui me plaisait car je pense que c’est le meilleur moyen d’avoir de bonnes idées. L’édition était mon secteur de rêve et j’ai eu la chance d’être recrutée par Laure en 2010 pour devenir responsable numérique des Editions First-Gründ. Je suis restée à ce poste pendant 3 ans, avec pour mission de lancer l’activité numérique de la maison.

Laure : J’ai commencé ma carrière dans le conseil en stratégie, chez Bain & Company, en 2001. Quatre ans plus tard, guidée par ma passion pour les livres et le secteur de l’édition, j’ai décidé de rejoindre le groupe Editis au sein de la Direction de la stratégie. J’ai eu l’occasion de travailler en 2007 sur l’acquisition des Editions Gründ, et j’ai eu un vrai coup de cœur pour cette maison consacrée au livre jeunesse et aux beaux livres. J’en suis devenue secrétaire générale. Puis, les Editions Gründ se sont rapprochées des Editions First, l’éditeur de la célèbre collection « Pour les Nuls », et j’ai été nommée en 2011 directrice générale-adjointe de cet ensemble. L’aventure a continué en 2013, avec la création d’Edi8, réunion des Editions First-Gründ et des Editions Plon-Perrin-Presses de la Renaissance, entité au sein de laquelle j’ai continué à exercer la fonction de directrice générale adjointe.
J’ai eu la chance de travailler toutes ces années avec de grands professionnels de l’édition, passionnés par leur métier, passionnés par les livres et leurs auteurs, et c’est eux qui m’ont donné l’envie d’innover et de me lancer dans cette aventure entrepreneuriale.


Pouvez-vous nous dresser le portrait robot d’un(e) auteur (e) ? (sexe, âge, déjà publié(e) ailleurs ou pas…). Et celui d’un(e) lecteur ?

Laure : Pour l’instant, c’est difficile de faire un portrait robot car nos auteurs sont très différents ! Nous avons un tout petit plus d’hommes (mais ça me paraît bizarre, je pense que ça va se rééquilibrer !) et la moyenne d’âge est de 40 ans.
La majorité d’entre eux sont des auteurs qui, après avoir envoyé leur manuscrit à des éditeurs sans recevoir de réponse positive, ont décidé de se tourner vers l’autoédition. Généralement, ce qui motive ce choix est l’envie d’être lu en dehors de son cercle de proches. Ils ne sont pas tous familier du livre numérique mais ont conscience de son intérêt et sont curieux de ce nouveau moyen de diffuser leurs écrits.
Dans les cas particuliers, nous avons un auteur déjà publié par une maison d’édition et qui publie chez nous des nouvelles – un genre peu prisé des maisons et une auteure publiée en papier mais qui avait conservé ses droits numériques et a donc publié son livre numérique chez Librinova.

Charlotte : Pour les lecteurs, ceux de Librinova sont proches des lecteurs numériques dans leur ensemble : des hommes (à 55%), jeunes, aisés (45% de cadres supérieurs) et de gros lecteurs.


Quelles sont les catégories de livres les plus achetées ? Avez-vous déjà des exemples de belles réussites d’auteur(e)s sur le site ?

Laure : Même si, là encore, nos statistiques sont minces pour le moment, on peut dire que le thriller et la romance sont des genre qui marchent très bien, de même que l’humour : notre « Petit guide de la drague par SMS » est dans le top des ventes depuis le lancement du site !

Selon vous, le livre numérique va-t-il tuer le livre papier ?

Charlotte : On espère vraiment que non, ce serait mauvais et pour notre business et pour notre épanouissement personnel !
Plus sérieusement, c’est la grande question que tout le monde se posait quand le livre numérique a commencé à se développer et la réponse est non. On constate déjà aux Etats-Unis, qu’après avoir connu une croissance exponentielle, le livre numérique se stabilise autour de 25% du marché en valeur. On se dirige clairement vers une cohabitation avec le papier. Ça ne signifie pas que certains domaines ne vont pas souffrir du développement du livre numérique – c’est déjà le cas pour les encyclopédies, les dictionnaires ou les livres techniques - mais les usages vont se compléter : des livres papier pour ceux qu’on veut garder, offrir ou lire chez soi, des livres numériques pour lire en voyage, s’informer ou découvrir des auteurs inconnus. Comme je suis optimiste, je pense au contraire que le livre numérique va amener des gens à la lecture et donc au livre papier.

En tant que femme, quelles ont été les difficultés rencontrées lors de votre création d’entreprise ? Comment as-tu pu lever ces freins ?

Charlotte : Nous avons toutes les deux le sentiment que c’est en entreprise qu’on nous faisait le plus sentir que nous étions des femmes, et donc parfois traitées différemment des hommes. Au contraire, depuis que nous avons créé Librinova, nous avons été très agréablement surprises par le peu de difficultés rencontrées et liées à notre statut de femmes entrepreneuses, notamment lorsque nous avons du faire un emprunt au nom de la société.

Laure : En fait, comme on parle beaucoup d’entrepreneuriat féminin en ce moment, c’est plutôt vu comme un atout d’être une femme.
Les difficultés que nous rencontrons sont plus celles de tout entrepreneur : comment se faire connaître auprès du grand public, gérer sa trésorerie, trouver de nouveaux clients etc.

Quels conseils donneriez-vous à une femme qui souhaiterait se lancer aujourd’hui ?

Laure : Je lui conseillerais de trouver le-la bon-ne associé-e, de connaître à fond son marché et de se lancer !

Charlotte : Et aussi de s’écouter et de se faire confiance : quand on crée son entreprise, il y a toujours des gens pour donner 1000 conseils – plus ou moins avisés – il faut savoir faire le tri, se fier à son instinct et avoir assez confiance en soi pour assumer ses décisions.

Faites-vous partie d’un réseau féminin ? Si oui lequel ?

Laure : A part HEC au féminin, qui est notre réseau « naturel » étant donné que nous sommes toutes les deux d’HEC, nous ne faisons pas encore partie d’un réseau féminin.

Charlotte : En vérité, nous avons eu une expérience malheureuse avec un réseau dont les valeurs ne nous convenaient pas et nous cherchons depuis le réseau qui nous conviendra !

Avez-vous un exemple de femme qui a pu vous inspirer ou avoir valeur d’exemple ?

Charlotte : J’admire les femmes qui se battent pour pouvoir choisir leur vie et en faire ce qu’elles veulent. Pour moi, ça va de l’actrice iranienne Golshifte Farahani qui a choisi l’exil pour pouvoir vivre son art, à Hillary Clinton qui a montré  qu’elle n’était pas qu’une « first lady » trompée mais une femme politique brillante et peut être la prochaine présidente des Etats-Unis.

Laure : Sont également sources d’inspiration toutes les femmes qui ont tenu ou tiennent des rôles majeurs dans la vie économique et qui par leur exemple ou leur témoignage nous donnent envie de nous dépasser. Je pense par exemple à Anne Lauvergeon ou à Sheryl Sandberg et à son livre « Lean in ».


Quels sont vos projets professionnels pour le futur ?

Charlotte & Laure : Nous avons le même projet : continuer à innover, entreprendre et  développer Librinova ! Trouver de nouveaux auteurs, leur offrir toujours plus de services, créer des partenariats de qualité… On ne manque pas d’idées pour les prochaines années !

Pour en savoir plus: le site internet de Librinova

3 commentaires:

  1. Je viens de découvrir votre site et j'ai parcouru tous les chapitres. J'apprécie votre démarche mais à cet onglet je suis surpris de lire "Elles osent! Entreprendre au féminin!"

    De prime abord je croyais que vous moquiez d'un journal ou un d'autre support considérant la création de l’entreprise par une femme comme un exploit unique et quasi surhumain. Mais non, vous-même semblez penser qu'il est plus difficile de créer une entreprise en étant une femme que si ont est un homme. N'est-ce pas inattendu de la part d'une féministe? Les difficultés ne seraient-elles pas plutôt ailleurs, dans la complexité bureaucratique de notre société, le marché submergé de produits où il n'est pas aisé de trouver une « niche », les financements alloués au compte-gouttes à des entrepreneurs qui ne font pas partie de réseaux d'influence, le coût inabordable de la publicité, etc. ?

    Vos interviewées paraissent elles aussi plutôt étonnées par cette supposition. Peut-être sont-elles trop optimistes et moi de même, mais, inversement, ne seriez-vous pas sur ce point un peu trop pessimiste?

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  2. La rubrique "Elles osent! Entreprendre au féminin" a pour vocation de mettre en avant les parcours féminins et d'inspirer les autres femmes, pas de sous-entendre que les femmes sont moins capables de le faire que leurs homologues masculins. C'est un fait, les femmes créent moins d'entreprises, notamment car elles ont peur de se lancer, que les dirigeantes sont moins représentées dans les médias, que les clichés ont la vie dure en la matière. Quand j'ai parlé à mon ex-DRH de ma volonté de me mettre à mon compte par exemple, sa réaction a été de me demander ce qu'en pensait mon mari puis de me demander quel était son métier "au cas où". Je vous invite à lire ces quelques chiffres http://racines-clefe.com/les-femmes-et-la-creation-d%E2%80%99entreprise/

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  3. Merci pour votre réponse mais je sais que le nombre de femmes créatrices d'emplois est moindre que celui des hommes. Vu l'histoire le contraire serait surprenant. J'ai commenté juste votre étonnement qu'il y en ait (exprimé par "Elles osent!): si tous les hommes ne l'ont pas encore compris, les femmes, elles, savent qu'elles peuvent "oser". Ceci dit, vous avez raison de mettre en valeur les exemples de réussites, ils peuvent toujours inspirer d'autres candidates.

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