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samedi 21 janvier 2012

Y a pas qu'au Huffington Post que les blogueurs bossent à l'oeil


Comme je l’avais écrit précédemment sur ce blog, le peuple de Twitter est connu pour son indignation collective. Dernier épisode en date : le lancement du Huffington Post dont la directrice éditoriale n’est autre qu’Anne Sinclair.

Outre le manque d’objectivité craint par la Twittosphère, ce qui fait grincer des dents c’est le modèle économique assumé par le site d’information qui se base sur le bénévolat de ses contributeurs. « Ces contributions ne seront pas rémunérées et seront l'équivalent de colonnes publiées dans d'autres médias. Mais nous leur donnerons la plus grande visibilité possible, grâce je l'espère, à la force de frappe du Huffington Post » écrivait ainsi Anne Sinclair dans son message adressé aux blogueurs. La riposte sur Twitter n’a pas tardé, comme le rapporte le site « Arrêt sur images » : On moque "cette vraie socialiste, qui considère que le travail, c'est pour la gloire", où on lui propose de venir bosser "gratos" chez soi, "genre compta, ménage, cuisine" et où l'on incite les blogueurs ne voulant "surtout pas monétiser" leur talent à la contacter. D'autres ricanent : "Au moins son mari payait ses prostituées."

Effectivement, ne pas payer ses contributeurs est un scandale mais une injustice très largement entretenue par la plupart des médias participatifs, comme nous l’apprend cet autre article d’ « Arrêt sur images ». On y découvre ainsi que seule une poignée de contributeurs est rémunérée de façon régulière : les « chroniqueurs associés ». Repérés par la rédaction des sites d’information, ils s’engagent à fournir régulièrement un contenu de qualité contre rémunération.

Mais les autres ?

Une chroniqueuse et journaliste pour le Plus Nouvel Obs s’insurge dans cet article contre "l'exploitation des contenus bénévoles", qui "lui soulève le cœur""Il y a trois modèles possibles, énumère-t-elle : soit on est sur un site totalement bénévole, où il n'est jamais question d'argent. Soit on travaille sur un site participatif, qui touche un peu d'argent, grâce à des contrats pub par exemple ; dans ce cas, les bénéfices doivent être partagés entre chaque rédacteur. Soit on participe à une entreprise commerciale, où, en dehors de toute considération de qualité éditoriale, un contenu produit constitue une valeur ajoutée. Et dans ce cas, on paye. On n'est plus en 2007, flatter l'égo des blogueurs ne suffit plus !"

Un discours auquel on ne peut qu’adhérer mais qui n’est pas cohérent avec la réalité, le Plus Nouvel Obs ne payant qu’une vingtaine de ses contributeurs. Où se situe donc le partage des bénéfices entre chaque rédacteur ?

Je peux parler en connaissance de cause, écrivant pour le Plus Nouvel Obs depuis ses débuts de façon bénévole. Certains articles ont très bien marché (l’un d’entre eux a fait plus de 15 000 pages vues et a été cité par Marie-Claire et sur Europe 1, un autre 12 000 pages vues et plus de 1000 tweets). Une visibilité que je n’aurais certainement pas eue sur mon blog.

Néanmoins, si j’ai renoncé à une rémunération c’est parce que je pensais naïvement que l’ensemble des participants étaient bénévoles, ce qui n’est pas le cas puisqu’une vingtaine d’entre eux est rémunérée. J’ai donc récemment postulé en tant que chroniqueuse associée.

On m’a alors répondu que Le Plus Nouvel Obs ne recherchait pas de chroniqueurs dans l’immédiat. Soit.

Ce qui m’a fait bondir ce sont les phrases qui suivaient et qui, à mon sens, n’étaient pas nécessaires : « Je comprends votre envie/besoin de rémunération mais nous ne pouvons rémunérer tout le monde pour des raisons économiques évidentes. Nous sommes très contents de valoriser de bons contenus, en revanche nous ne forçons personne à participer à cette belle aventure, qui rencontre chaque jour un succès grandissant. Chacun est libre de publier, de partager ses idées avec la communauté du Nouvel Obs. »

Un discours finalement pas très éloigné de celui d’Anne Sinclair : vous n’êtes pas payé mais nous vous offrons une belle visibilité. Et surtout vous participez à une « belle aventure ».

Est-il besoin de rappeler que le Nouvel Observateur est un journal de gauche ?

On est donc en droit de se demander pourquoi un même modèle économique suscite une telle différence de traitement de la part de la twittosphère. Est-ce dû à l’opacité entretenue par les médias participatifs quant au mode de rémunération qui sous-entend que tous les contributeurs sont logés à la même enseigne ? Où bien est-ce indirectement le personnage d’Anne Sinclair que l’on cherche à attaquer à travers cette indignation sélective ? Je penche pour la seconde hypothèse …

Edit : Aude Baron, rédactrice en chef du Plus Nouvel Obs, réagit dans les commentaires

10 commentaires:

  1. aller, en route pour l'aventure :-)

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  2. No comment, justement, sauf celui ci : dernièrement sur Viadeo circulait une offre qui a fait réagir de nombreux hubs de journalistes et rédacteurs pros : une pige "cuisine/gastronomie" par semaine pour... 5 €. Et que de brandir l'étendard du foutage de gueule et de la dévalorisation de la profession, de l'exploitation de la crise, de l'esclavagisme... et bien moi je suis sûre d'une chose : l'offre a trouvé preneur. Parce que tout le monde a besoin d'argent aujourd'hui, à moins de s'appeler de Bethencourt... ou Anne Sinclair. Pas besoin d'argent, donc pas besoin d'en parler... ni d'en donner au titre d'une rémunération : puisque des gens sont capables de bosser pour 5 €, ils peuvent tout aussi bien bosser gratis.

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  3. Je pense que bientôt on paiera pour écrire!

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  4. Bonjour Sophie,

    Votre billet soulève un débat intéressant, et pour le moins d'actualité. Comme je vous l'avais dit dans le mail que je vous ai envoyé, et dont vous reproduisez ici un extrait, les règles du jeu sont transparentes au Plus : une poignée de contributeurs dits "chroniqueurs associés" sont rémunérés, les autres ne le sont pas mais, et c'est là un détail important que j'ai mentionné dans le mail mais que vous n'avez pas reproduit, nous avons mis en place un système qui permet de récompenser les contributeurs les plus fidèles.

    Les règles sont transparentes et claires. Nous ne forçons personne à écrire. Si votre motivation première est de gagner de l'argent avec votre plume, ce que nous comprenons et respectons pleinement, effectivement le Plus n'est pas forcément le lieu le plus adapté. Dans ce cas, mieux vaut postuler dans des rédactions traditionnelles.

    Le moteur de nos contributeurs, c'est avant tout l'envie de partager des idées, de contribuer au débat et de faire avancer les choses. Les récompenses sont un bonus qui permettent que chacun ait droit, légitimement, à sa part du gâteau.

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  5. Bonjour Aude,
    En effet je n'ai pas mentionné le système de récompense car je n'ai trouvé aucune info précise à ce sujet ni dans votre mail ni sur le site : en fonction de quoi sont attribuées ces "récompenses", en quoi consistent-elles? Je n'ai jamais été informée de ce système en dépit des 13 articles écrits sur votre site.
    Et contrairement à ce que vous dites, les règles ne sont pas transparentes, ou du moins ne l'étaient pas jusqu'à ce que soit mentionné "chroniqueur associé" sur le profil des gens qui sont payés.Pour moi tout le monde était bénévole. Encore une fois la question n'est pas de forcer les gens à écrire, juste d'être rémunéré pour ce que je considère être un travail. Quant à avoir sa part du gâteau, un partage des revenus me paraît plus équitable qu'un paiement en "récompense" (quel horrible mot). Car oui, une de mes motivations est de gagner de l'argent grâce à ma plume, je n'ai pas à en rougir. J'ai quitté mon ancien boulot pour ça et je n'ai pas les moyens de faire du bénévolat (sauf pour des organisations humanitaires mais je ne crois pas que vous rentrez dans cette catégorie).

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  6. Donc :
    Twitter s'emporte quand on lui supprime l'accès à du contenu gratuit (MegaUpload).
    Et Twitter s'indigne quand on demande aux contributeurs de produire du contenu gratuitement.

    Euh... Il n'y a pas un paradoxe, là ?

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  7. Attention aux raccourcis. Le débat sur megaupload est multiple. D'abord parce que pas mal de gens payaient pour accéder à / partager du contenu, ensuite parce que les gens qui ont participé à la chaine de fabrication de ces memes contenus ont été rémunérés, que la rentabilité même de la plupart a déjà été atteinte avant ou après la mise en ligne sur ce genre de site, enfin parce que megaupload est un site de diffusion/partage, pas un site de production de contenu. Le souci avec le web se pose sur a relation contenu/public dnas la diffusion et la distribution, où il faut trouver de nouveaux modèles, peut être, porquoi pas moins dépenser de sous dans la production de publicités + achat d'espace destinés vendre les contenus (films, séries etc.) et miser sur le média gratuit (earned media pour les publicitaires qui traineraient)... ON s'éloigne on s'éloigne... :)

    Donc tout ça pour dire que les deux idées que vous exposez ne sont pas sur le même plan.

    Bonne soirée

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  8. et sinon euh ça existe dans la presse papier ou pas les contributeurs réguliers non rémunérés?

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  9. Bonjour, Je pense que la publicité mise en place pour la "sortie" du Huffington post vf a focalisé la colère de ceux qui veulent gagner leur vie en écrivant et qui se heurtent de plus en plus à ces propositions de travail gratuit! Bien entendu l'affaire DSK a mis en évidence l'immense fortune d'Anne Sinclair, et donc ce paradoxe pénible de voir qu'une femme extrêmement riche propose à des blogueurs de travailler gratuitement. Il serait temps qu'on arrête de ce considérer comme des victimes et qu'on s'allie pour tous refuser ce type de contrats, surtout qu'au bout du compte à quoi cela sert d'être mis en lumière si ça ne doit jamais aboutir à une rémunération! Aujourd'hui on considère qu'une personne est définie par le travail qu'elle fait, et donc que sa valeur correspond à son salaire: accepter de ne pas être payé, c'est accepter de n'avoir pas de valeur! Il est temps que ça cesse!

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  10. Célina : pas à ma connaissance mais j'avoue que ma connaissance de la presse papier est assez limitée...
    Valérie : je ne peux qu'adhérer à votre message!Le problème c'est que beaucoup de personnes écrivent maintenant pour le plaisir, à côté d'une activité rémunérée et concurrencent indirectement ceux qui veulent en vivre.

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