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mardi 23 avril 2013

"Les femmes sont bavardes" : encore une étude à la con, sexiste et erronée



L’article tourne en boucle sur Twitter depuis ce matin, dans une espèce de jubilation décomplexée : "Oui, c’est prouvé, les femmes sont plus bavardes que les hommes".

Un des clichés les plus répandus au sujet des femmes qui obtient une caution scientifique, voilà qui permet de retweeter sans être accusé de sexisme.

Sauf que.

La « protéine du langage » identifiée comme telle l’a été sur des rats puis l’étude a ensuite été extrapolée sur des enfants âgés de 4 et 5 ans qui étaient morts dans des accidents. Les chercheurs ont analysé la quantité de protéines FOXP2 qui se trouvait dans leur cerveau et en ont trouvé en moyenne 30% de plus chez les filles. Souci de taille : les chercheurs ne sont pas parvenus à démontrer que les hommes plus bavards produisaient davantage de cette protéine, au même titre que les femmes plus discrètes auraient des taux de cette protéine plus bas dans le cerveau.

La « découverte » a d’ailleurs suscité de nombreuses réactions, notamment de blogs spécialisés dans le langage qui contestent les soi-disant études qui démontreraient que les femmes sont plus bavardes que les hommes. Language Log cite notamment une étude publiée par Science Mag en 2007 intitulée: «Est-ce que les femmes parlent vraiment plus que les hommes et qui conclut que les hommes et les femmes utilisent à peu près le même nombre de mots par jour (16 000) à partir de recherches menées dans six universités aux Etats-Unis et au Mexique.

Ce qui n’a pas empêché les sites et les journaux de reprendre allégrement l’étude sans pincettes ni précisions.

Il faut dire que le sujet du langage est éminemment politique : il n’est pas neutre et reflète les enjeux de pouvoir et la division genrée de notre société.

Cet excellent article tiré du site « Les mots sont importants » l’explique très bien.

-       Le stéréotype de la femme bavarde est extrêmement répandu alors qu’aucune étude ne l’a formellement confirmé. Bien au contraire, de nombreuses recherches ont montré qu’en réalité, ce sont les hommes qui parlent le plus. (en 1951, Strodtbeck a mis en évidence que dans des couples hétérosexuels mariés, les hommes parlaient plus que les femmes)

-       Dale Spender s’est penché sur le mythe de la femme bavarde pour l’analyser : on ne juge pas les femmes en comparaison d’hommes qui seraient moins bavards. Elles sont jugées bavardes par rapport aux femmes silencieuses. « La norme ici n’est pas le masculin mais le silence, puisque nous devrions toutes être des femmes silencieuses. Si la place des femmes dans une société patriarcale est d’abord dans le silence, il n’est pas étonnant qu’en conséquence, toute parole de femme soit toujours considérée de trop. On demande d’ailleurs avant tout aux femmes d’être vues plutôt qu’entendues, et elles sont en général plus observées que les hommes (Henley, 1975). »

-       Un même comportement sera jugé différemment en fonction du sexe : alors qu’un homme pourra parler autant qu’il le souhaite, une femme sera sanctionnée pour la même action. C’est ce qu’on appelle le « double standard » : « Une étude faite lors de réunions mixtes dans une faculté montre la différence énorme de temps de parole entre les femmes et les hommes (Eakins & Eakins, 1976). Alors que le temps moyen de discours d’une femme se situe entre 3 et 10 secondes, celui d’un homme se situe entre 10 et 17 secondes. Autrement dit, la femme la plus bavarde a parlé moins longtemps que l’homme le plus succinct ! »

En conclusion, les femmes parlent trop, en effet, … par rapport aux femmes silencieuses ! Continuons donc à l’ouvrir !



8 commentaires:

  1. Mais en fait ça dépend de chaque individu... par exemple moi je ne parle pas beaucoup mais y'a un gars dans ma classe qui est une vraie pipelette. C'est juste que les mecs savaient pas quoi publier comme étude alors il on prit le premier truc qui venait... comme souvent d'ailleurs. Ca aurait très bien pût être "est-ce que les blondes sont vraiment plus bêtes que les autres" ou "est-ce que tout les hommes de rabaissent pas la cuvette des toilettes".

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  2. Léo , non ça ne dépend pas. Dans ta vie, oui surement, dans la mienne aussi (je suis un moulin à parole, et une de mes sœurs est plutôt discrète). Mais on remarque une constante à traiter différemment le bavardage féminin et masculin. Il ne s'agit pas seulement de savoir qui parle le plus, il s'agit surtout de voir ce que ça suscite comme réactions. Et les contre exemple personnels ne sont que le cache sexe des phénomènes collectifs, comme l'est celui de la domination masculine dans l'espace public.

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  3. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt ton article (et celui se trouvant sur Slate). La première chose qui m'est venue est : la dimension sociologique et sociétale n'a pas été prise en compte (pas par toi, par l'article auquel tu fais référence). Et on ne peut pas faire l'économie de cette dimension. On entend constamment que les femmes sont plus "communicantes" et verbalisent plus ce qu'elles ressentent (entre autre) non pas parce qu'elles ont des prédispositions biologiques mais parce qu'elles ont été élevées, imprégnées de cette idée.
    Si je voulais prendre le contrepied (provocant) de l'article en question je dirais que les filles doivent rapidement se faire comprendre afin de d'exprimer leurs désirs/besoins alors que les garçons étant plus valorisés dans les représentations sociétales et familiales, leurs désirs/besoins sont plus facilement anticipés. les filles doivent donc apprendre plus vite à s'exprimer. Tiré par les cheveux? Peut-être... Pas si sûr cependant...
    En tous cas, oui, je vais continuer à l'ouvrir! ;-)

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  4. Absolument d'accord avec ton analyse. L'étude fait totalement abstraction de la dimension sociale du langage ainsi que de l'importance de l'acquis par rapport à l'innée. Et j'espère bien que tu continueras à l'ouvrir! ;-)

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  5. Les femmes bavardes, les hommes discutent quoi. Vive les stéréotypes. Pffffff.

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  6. Bien sûr, les femmes sont bavardes = parlent beaucoup pour ne rien dire en fait, alors que les hommes parlent moins, mais pour dire des trucs importants. Et c'est scienti-fique-ment prouvé... à partir de rats qui n'arrêtent pas de parler, c'est bien connu.
    Ce qui est vraiment révoltant, c'est qu'il y a des journalistes pour relayer ce genre d'"infos" sans réfléchir.

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  7. Sans compter que si on compare des femmes au foyer, des infirmières, des institutrices, des agents d’accueil, tous ces métiers du "care", du contact où les femmes sont majoritaires avec les autres métiers où les hommes sont majoritaires, les métiers restant encore énormément sexualisés, forcément les femmes prononcent plus de mots que les hommes.
    Et si on prend en compte la répartition des tâches inégalitaire encore en cours à notre époque, forcément les femmes parlent plus de choses "sans importance" comme "montres moi tes devoirs, montre ton cartable, habilles-toi, lave toi les dents, arrêter de vous battre, bonjour je dois prendre rdv avec le médecin, bonjour la babysitter, vous voulez manger quoi" pendant que ces messieurs poussent un grognement de grande importance à propos des actualités du fond de leur fauteuil.

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  8. La seule explication à donner à cette étude c'est qu'on s'efforce aujourd'hui d'expliquer par "la" (sainte) science (en fait, n'importe quoi qui serait de la soit-disant science) ce qu'on disait avant sortir des "Saintes" Écritures. Il y a juste quelques trucs qui ne fonctionnent plus trop : prétendre par exemple que les femmes ont moins de côtes que l'homme. Mais pour le reste, ils n'arrêteront vraiment jamais de trouver des idioties pour se prévaloir d'une supériorité quelconque ou "smartness" (le bavardage c'est pas smart parce que : répétez zaprès moi : "la parole est d'argent, le silence est d'or").
    En réalité leur parole est sacrée et la nôtre c'est de la merde. C'est surtout cela qu'ils veulent dire par là. Je trouve immonde qu'ils aillent jusqu'à s'adonner à des expériences sur des animaux juste à seul fin de nous mettre le nez dans le caca. C'est révoltant !

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