Pages

A propos

Une question? C'est dans la FAQ!

lundi 24 septembre 2012

Les femmes dans la publicité : mi-putes, mi-soumises?



Vendredi dernier, j’ai découvert sur Twitter la couverture du dernier numéro de « Vogue Homme ».  Celle-ci met en scène Stéphanie Seymour et Marlon Teixeira et fait actuellement scandale aux Etats-Unis. 

En cause, l’image très sexuelle de soumission du mannequin féminin et la main de l’homme autour de la gorge de celle-ci.



Des associations ont écrit au groupe de presse pour manifester leur mécontentement « A New York, votre magazine apparaît dans de nombreux kiosques à journaux et a un large impact sur les jeunes hommes et femmes. Alors que cette une avait sans doute l’intention de choquer et d’attirer les lecteurs potentiels, ce qui est vraiment choquant c’est qu’elle glorifie la violence contre les femmes comme un acte d’amour". La lettre rappelle ensuite une "qu’une étude parue dans le Journal of Emergency Medecine sur les meurtres de femmes tuées par leur conjoint, selon laquelle 43% d'entre elles, avaient déjà été étranglées par le passé avant d'être tuées".

Lorsque j’ai vu passer cette couverture, j’ai immédiatement pensé à la campagne récente contre le viol. Il existe en effet de nombreuses similitudes entre ces 2 images : l’homme derrière la femme, cette main qui attrape, pour l’une, les seins, pour l’autre, le sexe, l’autre main placée sur la bouche ou autour de la gorge de la femme.

 Pour autant, quand on regarde la couverture de Vogue attentivement, on réalise qu’on est davantage dans l’ordre de la « soumission consentie » : en effet, Stéphanie Seymour fixe l’objectif avec un regard déterminé, comme si elle narguait le lecteur, qui se retrouve indirectement en position de voyeur. 

Même si la main semble posée sur la gorge, elle ne l’enserre pas : je vois ici davantage un jeu sexuel que de la maltraitance. Avant de dénoncer des pratiques, n’oublions pas que dans la sphère intime, il est possible de jouer  alternativement au « soumis » ou au « dominateur » sans que cela ne mette en jeu l’intégrité d’un des 2 partenaires. Dans ce cas, le « soumis » n’est pas forcément celui qu’on croit (sur la couverture d’ailleurs, c’est l’homme qui semble « victime » de son attirance, yeux fermés et mains autour du corps de la femme, alors que celle-ci, déterminée, regarde l’objectif droit dans les yeux).

Ce qui est gênant en revanche, c’est cette esthétisation à outrance de la violence, qu’elle soit consentie ou pas, dans la publicité.

Via @Mar_Lard, je suis tombée sur cet article édifiant qui récapitule les publicités mettant en scène de manière esthétique la violence envers les femmes :

Le magazine bulgare 12 et ses photos terribles de femmes blessées





Des images de bondages pour une marque de chaussures


Une photo de femme battue pour une publicité pour un salon de coiffure


Des clichés tirés du calendrier Pirelli évoquant à demi-mot un viol collectif



Des extrait du shooting mettant en scène les mannequins d’ America’s Next Top model





Une constante : une glamourisation de la violence qui conduit indirectement à sa normalisation. Pourquoi cette nécessité de maltraiter symboliquement les femmes et de les installer dans cette position de victime ? Est-ce une façon de leur faire payer le prix de leur beauté ? Un retour de bâton non pas idéologique mais symbolique ?

Dans le monde enchantée de la publicité, pas beaucoup de possibilité pour les femmes : soumise ou prostituée.

En 2008, les chiennes de garde avaient réussi à faire modifier une campagne pour Surcouf mettant en scène « deux jeunes femmes blondes en soutien-gorge, slip, et bas noirs, déhanchées et cambrées (…)», raconte l’association. «Ces deux jeunes femmes encadrent un adolescent, l’air niais. Lui posant la main sur l’épaule, elles s’apprêtent à l’embarquer, comme en témoigne le slogan : «résisterez-vous à autant d’avantages». Une « image de prostitution » pour l’association, puisque la mention «offre de 10 % de remise» est inscrite près des deux jeunes femmes. 



La semaine dernière, cette même association a épinglé la campagne des magasins « Virgin » pour des raisons similaires. Pour illustrer l’accroche « une putain de sélection », ces derniers n’ont rien trouvé de plus créatif que d’utiliser l’image d’une prostituée, en bas déchirés et sac à main en fausse fourrure rose ( jeu de mots subtil avec « Virgin » (vierge) en opposition avec « putain). Quel rapport avec des livres ou de CD? Aucun.



Alors, hors de la putain ou de la victime, point de salut pour les femmes dans le monde de la publicité ?

Ah si, il nous reste la ménagère de moins de 50 ans (relookée en « digital mum).





10 commentaires:

  1. la une de vogue ne me choque pas du tout, bien au contraire je la trouvais très glam avant que tu n'en parle. car je vois ici, 2 adultes consentants et je trouve que la femme au contraire est plus dominatrice que soumise sur cette photo (oui oui je vois tout ca dans son regard ! :-)
    par contre toutes les autre simages que tu montres sont en effet assez choquantes.
    c'est toujours difficile de s'adresser au public. d'ailleurs s'adresse t'il à TOUs le spublics, ou une sorte de public ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les publicitaires s'adressent en général à une cible de femmes bien définie, en fonction du produit qu'ils sont censés lui vendre. Mais dans une campagne d'affichage, toute sorte de public est confronté à ce type d'image

      Supprimer
  2. encore des visuels trash pour pas grand chose ....

    RépondreSupprimer
  3. C'est dingue, quand on prend du recul, le nombre de clichés que les médias nous balancent, l'air de rien.

    Et on se les prend en pleine face, et on les intègre. Et puis, un jour, on s'étonne. On s'étonne que les femmes soient discriminées à m'embauche, que des jeunes filles en bonne santé foutent leur vie en l'air pour perdre 3 kilos, que des mecs se croient autorisés à insulter des femmes qui ne donnent pas suite à leurs approches de séduction (plus ou moins mauvaises, mais là n'est pas la question).

    Vraiment, tout ça m'effraie un peu et j'ai du mal à comprendre pourquoi on ne réagit pas plus que ça. Mais, la raison est simple : ces images sont distillées, au compte-goutte, mais très régulièrement, et en tout "innocence" (ces deux adultes, de la pub de vogue, sont consentants, après tout, non?).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est exactement ça, une forme de "propagande" masquée, distillée au compte-goutte sous couvert de second degré, d'intention artistique ou d'humour. La pub n'est que le reflet de la société certes, mais amplifie et propage ses mauvais aspects.

      Supprimer
  4. Très intéressant article.
    Je viens justement de faire une série sur mon blog servant à expliquer l'aliénation de la perception des seins nus (et donc de notre corps) en raison de détournement (pervertissement) systématique par la pub de ce qui touche le corps féminin, et voilà que je trouve cet article via le blog jesuisfeministe.com.
    Pour appréhender le sexisme ou non de ces images il faut nous les représenter avec un homme et non une femme. Un homme pris au cou et enserré à la taille par une femme qui semble jouir de cette prise de possession, imaginer des hommes avec des fausses plaies au visage, au cou, tuméfiés, étalés sur le sol couverts d'ecchymoses, ligotés etc...
    Est-ce que la pub le ferait ? Si la réponse est non, ces représentations sont sexistes et devraient être interdites et leurs auteurs punis de peines lourdes. Car l'image plus que le discours a un effet durable dans les esprits. Elle pénètre bien plus profondemment l'inconscient et l'inconscient n'a pas d'humour ni ne comprend le 2e degré. L'érotisme c'est très bien s'il y a réciprocité dans les jeux de domination. D'autres part ces photos de jeux de domination auraient leur place dans le cadre d'un travail artistique photographique MAIS PAS DANS LA PUB.
    La pub sert à vendre des produits (normalement). Actuellement elle sert juste à manipuler les esprits. Elle ne nous dit rien de l'objet à vendre mais nous viole mentalement pour nous obliger à l'acte d'achat. Le viol est là parce que tout se joue tout le temps sur la stimulation sexuelle. Une stimulation sexuelle non désirée.
    Ce n'est pas normal de manipuler le désir sexuel des gens pour leur faire acheter des produits. Le fait que tout le monde trouve cela normal aujourd'hui en dit long sur l'étendue de l'aliénation.
    Il faudrait peut-être songer à mettre des limites drastiques à la pub quant à l'emprise qu'elle s'est donnée sur nous surtout si elle viole, défigure et tue symboliquement les femmes.
    ça suffit, non ?

    RépondreSupprimer
  5. consentante, alors que le mec lui tient fermement les poignets plaqués au sol? Et les autres mecs qui attendent leur tour? Le porno avec ses gang-bangs a tellement "pénétré" les esprits qu'une pareille scène paraît à des jeunes femmes autre chose qu'un scénario de viol collectif esthétisé...L'heure est très grave, car la puissance des images dans l'inconscient est plus grande que les discours qui pourraient tenter de contrecarrer cette culture du viol et de l'érotisation de la domination. Qui n'est pas un vain mot ou un slogan, mais bien une réalité. Chaussez-vite vos lunettes féministes, les copines, vous y verrez plus clair.

    RépondreSupprimer
  6. Je ne parle évidemment pas de la photo d'illustration du billet (c'est bien de faire attention à ce qu'on lit parfois ou de "chausser ses lunettes" comme vous dites) mais de la couverture de Vogue.

    RépondreSupprimer
  7. En effet Sophie et Anonyme, si vous jetez un oeil au reste du photoshooting du cover de vogue, il montre un homme dominé par une femme. La photo présentée sur la couverture est la moins représentative du reste du photo shooting. Ceci dit, cela n'excuse en rien la violence faite aux femmes et ça n'encourage pas plus l'équité entre les sexes...

    RépondreSupprimer
  8. Si vous lisez bien, je dis justement que la couverture de Vogue ne me choquait pas. C'est plutôt la tendance globale de la "maltraitance" des femmes dans la pub qui me dérange.

    RépondreSupprimer